http://www.lamusiquepourtoujours.net/ar ... 05289.htmlMichel Magne était l'un des compositeurs de musiques de films les plus doués et les plus talentueux de sa génération. Acculé par des dettes qui devenaient trop lourdes à supporter et dégoûté de la perte de « son » Château d'Hérouville dans le Val d'Oise où il avait emménagé, à grands frais, un superbe studio d'enregistrement, Michel Magne décida de tirer sa révérence. Auteur de plus de 110 musiques de films, il eut une période très prolifique entre 1963 et 1973 pendant laquelle il dut répondre à de nombreuses sollicitations. Outre la série des « Angélique », il se chargea de la trilogie des « Fantômas » qui nous intéresse tout particulièrement. Pour le premier des trois longs métrages, l'influence « jazzique » est perceptible dès le début du générique. Mêlant des thèmes très contrastés tantôt pour les scènes où apparaît le criminel, tantôt pour celles où notre admirable Fufu entre en piste, le musicien nous entraîne au sein même de l'action en utilisant tout ce qu'il y a de plus conventionnel dans les variantes instrumentales pour ce genre de film : les cuivres pour annoncer l'arrivée du bandit, les percussions dites « légères » (xylophone) pour les pitreries du Commissaire Juve... Ecoutez la bande sonore du générique de « Fantômas se déchaîne » : l'auteur utilise carrément ce procédé afin d'exprimer musicalement, et avec quel brio, les péripéties marquantes du premier épisode. Pour le troisième volet des aventures du personnage créé par Pierre Souvestre et Marcel Allain, « Fantômas contre Scotland Yard », et du fait qu'elles sont censées se dérouler en Ecosse (alors qu'en réalité, les scènes dans le Château ont été tournées dans celui de Roquetaillade, en Gironde et celles pour la chasse à courre en forêt de Fontainebleau... pour la petite histoire !), le générique débute, somme toute logiquement, sur un très beau morceau de cornemuses qui précède le thème propre à Fantômas dont la ligne mélodique a subi quelques petites modifications : le rythme est sensiblement plus lent, agrémenté d'effets musicaux en référence à ceux qui accompagnent traditionnellement cette cruelle pratique de chasse à courre.
Pour en revenir à la carrière de Michel Magne, signalons que c'est lui qui est à l'origine des musiques des films d' « OSS 117 » réalisés, comme pour les « Fantômas » par André Hunebelle (ce dernier avait son compositeur fétiche, tout comme Jean Girault avec Raymond Lefèvre) ainsi que de « Mélodie en sous-sol », « Les barbouzes », « Les tontons flingueurs » et les films de Jean Yanne : « Moi y en a vouloir des sous », « Les Chinois à Paris » et « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » pour ne citer que les principaux. C'est en 1962 qu'il acquiert avec un ami le Château d'Hérouville complètement en ruines qu'il décide de retaper. Toutes ses royalties y passent pour en faire un endroit paradisiaque où les personnalités du show- business aimaient s'y retrouver (il lui arrivait d'accueillir deux cents ou trois cent convives...). A la mort de son ami en 1965, il rachète la partie droite du Château tout en continuant ses petites « extravagances ». A partir de mars 1968, les événements se précipitent : son épouse le quitte et un incendie détruit l'aile gauche du Château qui venait d'être rénovée à grands frais. Michel Magne se lance alors, à corps perdu, dans la réfection de sa propriété et installe un studio d'enregistrement dans l'aile droite. Par la même occasion, il fonde une société : « Studios d'Enregistrement Michel Magne » et, après le « George Sand », un autre studio, baptisé « Chopin » est aménagé. Désormais la société emploie une vingtaine de salariés pendant que Michel Magne reçoit toujours du beau monde et délaisse peu à peu son travail de compositeur au profit de son costume d'hôte afin de veiller aux bons soins de ses invités. Ses studios ayant acquis une renommé internationale, il voit défiler les plus grandes stars. Elton John qui y enregistre un album complet : « Honky Château ». Malheureusement, Michel Magne ne parvient plus à faire face aux besoins financiers du Château et suite à une association qui ne lui causera que de graves ennuis (faillite frauduleuse), il se sépare de sa société et de sa propriété en juin 1979. Marqué par ces échecs cuisants, il n'arrivera plus jamais à se remettre au travail convenablement, et, malgré un refuge artistique dans la peinture et la sculpture, il choisit de se donner la mort au Novotel de Pontoise le 19 décembre 1984... Triste épilogue pour un compositeur de génie qui aurait mérité une fin de carrière beaucoup plus glorieuse !
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