Paradise – Marc Cerrone – Avril 2018J’ai pour (mauvaise) habitude de lire les livres que je vais offrir, tant qu’ils ne sont pas sleevés. Cette fois, j’ai préparé un cadeau pour un fan transi de Cerrone.
Moi, Cerrone, c’est beurk. La disco-funk-dance je déteste, et ce mec ne me paraît pas du tout sympathique.
A la moitié du bouquin j’arrive à la conclusion que le type est un mégalo doublé d’un mythomane :
Il fait partie des 5 artistes les plus samplés au monde ; c’est l’inventeur du mot « disco »; Barclay le signe direct après l’avoir vu faire la manche à la batterie à Saint-Tropez ; avec Kongas, il remplit à les en faire exploser les bars et les boîtes de Saint-Tropez, etc.
A à peine 20 ans, il créé le magasin Import Music, dans le plus grand centre commercial d'Europe de l’époque, Belle-Epine (à Thiais en région parisienne), il monte son label et fait presser 5000 albums à Londres, pour les vendre dans son magasin et en porte-à-porte. Il ouvre encore d’autres points de vente et vend à d’autres magasins comme Champs Disques (qui allait devenir Nuggets il me semble).
Puis c’est au tour d’Ahmet Ertegün, le propriétaire d'Atlantic Records de vouloir à tout prix le signer (
là je crois rêver) ;
Jimmy Page enregistre avec lui (
d'ailleurs, l'incident de la cocaïne - que Page s'enfournait par palettes - est à mourir de rire) ;
Il passe son temps au studio 54 à New-York, fréquentant de très près Warhol, Basquiat, Goude, Grace Jones, Gaultier & Cie ;
L'équipe Monty Python veut absolument tourner un clip avec lui (
moment hilarant du bouquin d'ailleurs) ;
Quincy Jones vient l’écouter en douce, dans les coulisses, lors d’un de ses concerts ;
Nile Rodgers se précipite à Paris ou Londres sur simple demande, juste pour gratouiller sa guitare à ses côtés, etc.
Le Dalai Lama veut le rencontrer * (
il n’a pas écrit que le Pape de l’époque souhaitait l’inviter au Vatican, ce qui m’a un peu surprise …).
Avec ses disques, il enchaîne carton sur carton. Ca se chiffre par millions d’albums.
Avec ses spectacles musicaux à plus de 600.000 spectateurs (à Hollywood, à l’Arc de Triomphe, au Château de Versailles et j’en passe), il va de triomphe en triomphe.
Ses shows sont à haut risque vue la démesure des projets, mais tout se finit toujours très bien.
Profitant d’un creux de vague dans les années 90, il se met à l’écriture et pond 3 romans. Paf, succès encore, un éditeur adore et le publie. De plus, l’un fera l’objet d’un film avec Alain Delon et Claude Brasseur notamment (
et pourquoi pas Brando, tant qu’on y est ? je me dis).
Un jour, une association caritative lui demande de peindre une toile pour une vente aux enchères. Il n’a jamais peint ? Qu’à cela ne tienne, il en tombe une dizaine et tout le monde crie au génie pictural (voir là pour ceux que ça intéresse :
http://cerronegallery.com/paintings.php faut aimer mais ce n’est pas absurde ; je trouve que ce sont des toiles très évocatrices de sa musique, en tout cas).
Un autre jour, plus récemment, son fils – DJ – lui dit qu’un DJ très connu veut sampler l’un de ses titres. Le bon Cerrone comprend mal le nom et lui répond « mais je ne le connais pas ton Bob Lascar ! » ; il finira par sortir un disque avec ledit Bob Sinclar. Encore un carton, bien entendu.
A mi-chemin du bouquin, je me dis que le délire mythomane de ce mec est un peu excessif. Bref, je doute fort que tout ceci soit vrai.Je vérifie tout, et … Tout ce qu’il raconte est rigoureusement exact.
Cerrone est un monument de la musique, de la french touch comme on dit ; il faut bien l’admettre.
J’avoue, je n’en reviens pas.
De plus, à travers ses écrits, on sent un homme heureux de vivre, simple, honnête, fidèle à ce et à ceux qu’il aime, obstiné ; un businessman autodidacte qui s'est construit à la force du poignet. C'est aussi un homme doté d’un optimisme à toute épreuve (ce qui est, je pense, la vraie clé de sa réussite).
Je n’ai pas regretté cette lecture. Si vous tombez dessus dans une médiathèque, lisez-le, c’est pas long et ça vaut le coup.
(et puis ça m'a fait plaisir de voir porté au grand public le talent de Lene Lovitch, grande amie de Cerrone, depuis plus de 40 ans).
En ce moment, Cerrone boucle la boucle en reformant Kongas, son groupe d’origine, qui devrait se produire courant mai 2018 je ne sais où.
*
Cerrone est devenu boudhiste dans les années 90, ce qui l’a – dit-il – sauvé des excès du monde de la nuit, notamment de la cocaïne. Il apporte aujourd’hui régulièrement son soutien à la cause tibétaine et, plus globalement, à la préservation de la planète.