Ça n'aurait pas dû paraître ici, ni maintenant. Mais il est des jours où Caliméro s'en fout.
1.
Damage *****
2.
God's Monkey *****
3.
Brightness Falls ***
4.
Every Colour You Are ****
5.
Firepower *****
6.
Gone to Earth ****
7.
20th Century Dreaming (A Shaman's Song) ***
8.
Wave *****
9.
River Man *****
10.
Darshan (The Road to Graceland) **
11.
Blinding Light of Heaven ****
12.
The First Day *****
(la réédition de 2001, remixée par Sylvian, remplace
Darshan (The Road to Graceland) par
Jean the Birdman et gagne facilement une étoile)
❧
Robert Fripp a un jour eu ce mot fameux : un concert, c'est comme un rencart avec une jolie fille, et un disque, c'est comme une lettre d'amour. En filant la métaphore, je dirais que ce
Damage est une lettre assez érotique pour enfiévrer vos rêves pendant un bon moment, et dont le parfum aura de quoi faire chavirer jusqu'à l'employé des Postes lui-même.
En 1991, l'idée d'une nouvelle réunion de King Crimson est dans l'air. Fripp propose à David Sylvian, ex-Japan, d'en être le nouveau chanteur, mais celui-ci décline, trop intimidé par le bagage historique du groupe. Néanmoins, les deux hommes s'entendent bien (Fripp a joué pour Sylvian sur son excellent album solo
Gone to Earth), et Sylvian propose à Fripp de l'accompagner dans la tournée qu'il doit donner au Japon en 1992. L'affaire est entendue, et tout se passe tellement bien qu'il en sort également un court album,
The First Day, et de nouveaux concerts durant l'année 1993. C'est à ce moment-là que se situe l'enregistrement de
Damage.
L'alchimie est parfaite : tantôt domine le romantisme suave de Sylvian, principalement sur les titres issus de sa carrière solo (
Wave,
River Man), tantôt la guitare acerbe de Fripp (
God's Monkey,
Firepower). Trey Gunn et Pat Mastelotto (on les retrouvera dans le King Crimson millésime 1994) offrent une solide assise rythmique, sans jamais tirer la couverture à eux ni se faire trop discrets, et la « guitare infinie » de Michael Brook ajoute à l'ensemble une ambiance unique. L'improvisation pure est limitée à
Darshan (The Road to Graceland), un peu pénible sur la durée ; le reste est bien huilé et fonctionne à la perfection : le crescendo final de
God's Monkey, plein de tension ; la coda de
Firepower, brumeuse et inquiétante ; et bien d'autres moments.