Je me permets d'ouvrir, une fois encore, un sujet sur ce fantastique groupe de progressif hongrois, Omega, qui plaira, j'en suis certain, à tous les amateurs de Pink Floyd.
En 1959, quatre étudiants de l’école Attila-József à Budapest, János Kóbor, József Laux, András Kovacsics et István Varsányi, souhaitent former un groupe. Le hic, c’est qu’aucun d’entre eux ne maîtrise un instrument. Ils tirent au sort pour décider qui apprendra à jouer de quoi. En 1962, László Benkõ, Péter Láng et Tamás Künsztler rejoignent le groupe pour un premier concert au club universitaire de Budapest. En 1964, Omega décroche un contrat comme intervenant régulier au Eötvös Klub. En 1966, la playlist de leur show est constituée de tubes de l’époque (Paint it Black des Stones, Bus Stop des Hollies, No Milk Today des Hermans Hermits…).
En 1968, Omega est invité à jouer en première partie de "Traffic" et du "Spencer Davis Group". John Martin, le manager du "Spencer Davis Group" est emballé par la prestation du groupe et invite nos hongrois à tourner en angleterre. Eric Clapton et George Harrison féliciteront Omega après une affiche partagée avec les Who.
La même année, les Ome-gars (hun, hun) enregistrent leur premier album chez Decca, le label des Rolling Stones : "Omega Red Star From Hungary". Le disque est mis en boîte en trois jours (cela s’entend). Pour des raisons de visa, Omega ne peut rester en Angleterre plus longtemps et doit retourner en Hongrie. Decca fort embêté par l’affaire engage Misi, hongrois d’origine, pour finir l’album. On imagine bien le boss du label dire qu’un con de hongrois, c’est un con de hongrois et que le public ne verra pas la différence d’un morceau à l’autre. En fait, si. Résultat : une fiente sans nom et des ventes catastrophiques.
L’histoire aurait pu s’arrêter là… Pourtant, en 1969, Omega sort "Gyöngyhajú lány" (inclus sur l’album 10000 lepes) qui devient instantanément un hit en Hongrie (100 000 exemplaires écoulés en quelques jours). Ayant entendu parler du succès par-delà les frontières, divers labels contactent Omega pour sortir une version anglaise de leur tube, ce sera "Pearls in Her Hair". Les Scorpions, en mal de single (ah bon ?), ont d’ailleurs pompé la mélodie principale en 1995 pour le titre "White Dove". C’est dire si c’est un putain de hit, ce morceau ! La carrière de Omega est lancée.
Après plusieurs changements, au fil des années, le line-up du groupe Omega sera composé, en août 1971, de János Kóbor aux chants et percussions, Tamás Mihály à la basse, Ferenc Debreceni à la batterie, György Molnár à la guitare et László Benkõ aux claviers.
En 1972, Omega désire sortir chez Hungaroton, un label hongrois, un album appelé "200 évvel az utolsó háború után" (200 ans après la dernière guerre), mais se heurte à la censure. En effet, une vision noire et très négative du régime hongrois est développée dans la plage titulaire. Peter Hauke, le directeur de la maison de disques allemande "Bellaphon" accepte de sortir l’album en version intégrale, mais en anglais. Le titre "Suite" occupe toute la première face de "200 Years after the Last War". On sent que Omega a beaucoup écouté Genesis et Pink Floyd, avant de mettre en boîte ce long morceau, recommandé à tout bon progueux 70’s. Trois autres albums sortiront chez "Bellaphon", il s’agira de "Omega", "Omega" et "Omega III" (comme c’est original !) qui reprendront des versions adaptées en anglais de morceaux parus sur des disques sortis en Hongrie entre 1969 et 1973.
En 1974, Decca, qui a continué à suivre la carrière de Omega, signe un contrat de deux albums avec la formation. "The Hall of Floaters in the Sky" paraît. En réalité, il s’agit du réenregistrement en anglais de "Nem Tudom A Neved", sorti un peu plus tôt, la même année, en Hongrie. Malgré quelques bons passages, le résultat est assez faiblard. Le groupe ne parvient pas à recréer la même énergie que sur la version hongroise. La raison est simple. Une lassitude s’installe à force d’enregistrer plusieurs fois les mêmes chansons. Voilà pourquoi, Omega négocie, à partir de 1975, l’arrangement suivant entre Decca, Bellaphon et Pepita, label hongrois remplaçant Hungaroton depuis l’incident de "200 Years..." : la musique des albums sera enregistrée une seule fois dans les studios Offenbach en Allemagne et servira de base pour les versions anglaise et hongroise, le chant étant simplement ajouté après dans la langue voulue.
En 1976, Omega enregistre son meilleur album "Time Robber" ("Idõrabló"). Evidemment, l’accent du chanteur est parfois agaçant : les versions anglaises sonnent comme si elles avaient été enregistrées en hongrois (du genre ’through’ prononcé ’FRewww’). Bien entendu, l’introduction de "Invitation" est copiée sur "Lady Fantasy" de Camel et "Don’t Keep Me Waitin’" rappelle furieusement Pink Floyd. Néanmoins, "Time Robber" est un grand album. Entre space rock, rock progressif et hard rock 70’s, les ambiances, les changements de tempos, les arrangements super bien foutus, les thèmes de guitare, les solos d’orgue et tant d’autres éléments ne peuvent manquer de retenir l’intérêt de l’auditeur.
Dans la même lignée, "Skyrover" (1978) et "Gammapolis" (1979) suivront.
Le reste est, vous vous en doutez, moins passionnant. Les batteries électroniques toutes nazes, les guitares chorus et les claviers dégoulinants pointent leurs sales gueules dés 1980. Aujourd’hui, Omega remplit toujours les stades en Hongrie. Leur dernier album sonne comme du Lordi, les coiffures permanentées et les fringues en cuir en plus. C’est dire si c’est bon !
En clair, il ne vous reste plus qu’à faire comme moi et vous consoler en (ré)écoutant les albums des seventies.
Votre nain préféré vous conseille quatre albums (dans l'ordre de préférence) :
Time Robber (1976), Bacillus/Bellaphon & Decca,
200 Years After The Last War (1974), Bacillus/Bellaphon,
Skyrover (1978) Bacillus/Bellaphon et
Gammapolis (1979) Bacillus/Bellaphon.
En bonus