Je sais ce que vous allez vous dire : "ce type est resté bloqué en 1970..." et vous auriez raison, mais qui oserait me jeter la pierre ! les années 1969/70 sont je pense les plus créatives de la période emblématique des 60's et 70's. Je m'explique : en 1969 le rêve hippie a sévèrement pris du plomb dans l'aile, le psychédélisme se tasse et musicalement, le rock devient heavy et progressif. C'est au tournant des années 70 que tous les styles fondamentaux du rock s'amalgament.
Avec Power of Zeus, on revient dans cette region froide mais fertile du midwest US où poussent le blé et les superbes galettes mieux qu'ailleurs. Le groupe s'appelle Gangrène à sa création en 1968, il est formé à Détroit par Joe Periano (guitare/chant), Bill Jones (basse/chant), Bob Michalski (percu) et Dennie Weber (claviers). Après avoir fréquenté les clubs de la région, s'être momentanément installés au Wooden Nickel Club, ils signent chez Rare Earth (Motown) à condition de changer de nom; c'est donc en tant que Power of Zeus qu'ils enregistrent leur unique album en 1970.
Les influences du groupe sont facilement identifiables et se trouvent dans la continuité du british heavy-rock comme Black Sabbath ou Led Zeppelin, voire Deep Purple ou Hawkwind. Leur manque de succès semble surtout reposer sur le peu de compétence dont fait preuve un label comme Motown à promouvoir des disques heavy.
C'est l'orgue qui domine l'album, et répond efficacement à la guitare de Joe Periano. Le morceau d'ouverture
It couldn't be me donne le ton, avec ses soli survoltés et les envolées vocales de Periano, dans un style très proche de Deep Purple en plus bluesy.
In the night démarre sur les mêmes rythmes avant de virer sensiblement freakbeat avec un tambourin et une caisse claire atypique du heavy-rock, puis apparait l'orgue qui joue un pont limite baroque avant de relancer la machine !
Green grass & clover ralenti le tempo avec son Hammond façon Moody Blues et la frénésie reprend avec
I lost my love et des percu samba l'espace d'une accélération.
The death trip clos la face 1 dans une ambiance sombre assez lourde, évoquant un Black Sabbath les choeurs en plus, se fondant dans les graves sous les martellements de la basse de Bill Jones. Un orgue de cathédrale élève le morceau vers des sphères vaporeuses avant qu'il ne replonge six pieds sous terre dans un style douceret de pop baroque éloquent, accompagné des déclamations sacerdotales de Periano, qui repète inlassablement le refrain, ponctué d'un glas funeste.
La seconde face démarre dans un ton heavy-blues avec
No time puis enchaine sur un morceau plus lent et mélancolique,
Uncertain destination, où la guitare bourrée de reverb' souligne la puissance vocale de Periano, avant de virer psyché, tripatouillant de ça de là, accompagnée par un orgue résonnant comme un clavecin, puis de reprendre un blues heavy à la façon de Clapton avec Cream.
Realization poursuit dans le blues/claviers, recèle d'un solo bouillant, envoies des breaks et des accélérations intenses, avant de laisser la place à
Hard working man, plus typé blues midwest, avec sa touche de boogie et son solo acidulé.
Enfin, un coup de gong ouvre le morceau final,
The sorcerer of Isis, qui s'annonce franchement psychédelique : guitare lancinante, voix incantatoire, Hammond qui fuse. Le solo d'une minute assez calqué sur un morceau d'Hendrix est suivi d'un passage expérimental composé de bruitages totalement incohérent, puis le morceau reprend comme il avait commencé, étrange, psychédelique, presque dérangeant. Les guitares vénéneuses reprennent et finissent par se noyer dans le fade out qui clos l'album.
D'ailleurs Alcat01 est déjà convaincu