Chapitre II, White Side : Tout commence par le très protocolaire Procession. Battement de cœur ou grosse caisse cogne au fond, la Red Special se contorsionne pour introduire le deuxième album de Queen. Sans parole, ce titre n’est qu’une introduction pompeuse signée par le guitariste. Dans le même élan, Father to Son est la première véritable chanson de l’album. Aucun détour dans le son, Brian May compose ici un riff heavy-metal nerveux laissant de la place aux chorales et dialogues harmonieux de Mercury qui construit des superpositions de sa voix si malléable. L’effet est saisissant, en quelques instants nous sommes plongés dans le son Queen, cette célèbre association du son rock de Brian May et le lyrisme coloré de Freddie Mercury. Les bases sont jetées ici.
Le décrescendo pop de Father to son meurt dans un souffle mélancolique de la Red Special. Le calme revient, le titre référence de la face blanche s’avance doucement avec raffinement. Cymbales, guitares acoustiques et voix de velours entament White Queen (as it began). Enfin la première envolée, gros coup guitare mais tout est finesse et la guitare acoustique revient et jouera même un solo soutenu. Enfin le son « Brian May » vient supplanter l’acoustique dans une multitude de sonorités variées. Rapidement, peut être trop rapidement, White Queen (As it Began) s’achève dans un dernier souffle.
Brian May composera, tout au long de la carrière de Queen, de nombreuses balades. Some Day One Day en est le premier exemple. Pop et gentil, Brian May chante ce titre léger et il adoucie largement le son de sa guitare pour obtenir une mélodie très pop, un peu ensoleillé.
Le dernier titre de la face blanche est signé par le batteur, Roger Taylor. Celui-ci avait déjà signé un titre sur le premier album de Queen. The Loser in the End est aussi pop mais à l’opposé des balades de Brian May. Lourd, percutant, presque agressif, Roger Taylor chante aussi sa composition, laissant Mercury loin des micros sur cette fin de face. La voix rocailleuse de Taylor accentue davantage le contraste avec la fluidité vocale de Brian May. Tout fois ce dernier s’amuse avec son instrument en obtenant des sons vif, agressif (la rythmique) et fluide.
Penzance, 29 mars 1974. Chapitre III, Black Side : Que les hostilités commencent. Nuages de fumé, cries aigües, riff heavy-metal, Ogre Battle ! Freddie Mercury entame sa face avec un titre particulièrement violent, la guerre ouvre la seconde partie de l’album. Chevauchait horde de cavaliers, bombardaient canons, le sang bouillonne dans les tempes de Mercury, il est en fusion et je peux vous dire que ça n’a rien de nian nian. Brian May suit l’idée et il nous livre un solo bataillant entre la saturation et le riff barbare. Même John Deacon martyrise ses cordes de basse afin de claquer une rythmique violente alors que Roger Taylor titre le canon à boulets rouges. Tout est vitesse et nervosité jusqu’à l’assaut final. Triomphante la voix de Mercury détaille un récit de champ de bataille. Hurlements de douleur, coups de canon, chevauchées (le thème Highlander n’est pas loin) héroïques et le cauchemar s’achève, le glas vient de retentir.
The Fairy Feller’s Mater-stroke nous fait voyager dans une rêverie bien plus sucrée que la sanglante bataille d’avant. Néanmoins on ne perd pas de temps et l’histoire nous est contée tambour battant. Ici Mercury fait référence à une toile du même nom peinte par Richard Dadd entre 1855 et 1864. Sur ce tableau, les personnages mystérieux sont nombreux. Mercury, de son coté, décrit l’évanouissement des rêves d’enfant et de son monde imaginaire que lui-même ne cessait de créer dans son enfance.
Au piano, Nevermore est une courte liaison avant de se lancer dans la clé de voûte de la face noire. Jolie mélodie pop et calme, elle se termine dans un grand effet de chorale.
Et on y arrive, The March of the Black Queen. Introduction au piano, quelques notes de guitares et l’explosion. Une chorale, des dialogues, des cloches, encore une bataille, des moments pop ainsi Mercury ne cesse d’imaginer. Combien de visages prend cette chanson en à peine plus du six minutes ? Queen, le rêve de Bulsara, le groupe de Mercury ne serait pas les démons de Freddie ? Il veut bien devenir la Reine et régner avec autorité mais dans les ténèbres. Toutes ces superpositions sonores sont là pour maquiller la réalité. L’obscurité est d’être dans la lumière. Dans le noir Farrokh peut rêver sans contrainte, sans risque. Dans la lumière, il rêve les yeux ouverts dans un monde bien réel. La complexité technique de la chanson défini particulièrement bien l’esprit torturé de Mercury. Elle sera aussi un très bon entrainement pour le future Bohemian Rhapsody.
La série rock progressif s’achève sur la lourde et surprenante chanson, Funny How love is. Si tout est sombre jusque là, bataille, rêves anéantis, déception, reine noire, le final est heureux. Funny How love is est tout simplement une ode à l’amour, élément difficile à saisir pour Mercury comme pour Bulsara et pourtant toujours à portée de la main.
La Face Noire se conclue sur la version complète de Seven Seas of Rhye pendant laquelle, le temps d’un instant, Mercury replonge dans le monde imaginaire et féérique de son enfance. Ce titre sera le single de l’album et le premier succès de Queen. Il sort le 23 février 1974 et atteint la dixième place dans le top 50 britannique.
Chapitre IV, autour de Queen II : Il faut bien remarquer une chose à travers cet album, Queen veut se donner les moyens de percer dans le monde du rock. Après avoir difficilement enregistré le premier album, Queen II est enregistré au Trident Studio à des heures choisies. Désormais le groupe peut louer les studios sans attendre que les autres aient finis d’enregistrer. Le résultat est félicité par la presse qui accueille bien l’album.
La tournée de premier album ne débute qu’au Golden Green Hippodrome le 13 septembre 1973, après avoir terminer la préparation du deuxième album. Un mois plus tard Queen donne son premier concert hors du royaume, à Bonn en Allemagne. Ils joueront aussi à Luxembourg quelques jours après. Enfin le groupe tournera jusqu’à Noel à travers tout le Royaume-Uni. Ils participeront à un festival (au concert désastreux) à Sunbury en Australie en février 1974, un mois avant la sortie de Queen II. Dès mars 1974, Queen repart en tournée à travers le Royaume-Uni. Durant cette tournée, Nutz ouvrira alors Queen.
Enfin une opportunité de partir de l’autre coté de l’océan Atlantique s’offre à eux. Le groupe Mott the Hoople propose à Queen de les suivre pendant leur tournée US qui débutera bientôt. Queen saute sur l’occasion et donne son premier concert aux Etats Unis à Denver le 16 avril 1974. Mais la malchance frappe encore Queen et plus particulièrement Brian May (déjà blessé au bras en Australie) qui souffre d’une hépatite. Son absence va forcer le groupe à abandonner la tournée US avec Mott the Hoople. L’aventure américaine s’achève le 11 mai à New York à l’Uris Theatre.
La face B du single Seven seas of Rhye est un blues lent et sulfureux, See What a fool I’ve been. C’est une chanson inédite sur les albums. Elle est signée Brian May.
Arrivé de Queen sur le sol US. 