
La pochette annonce la couleur: Mick Ronson brandit sa guitare comme un énorme phallus; jamais analogie ne fut plus évidente. Au recto, c’est le versant féminin qui est exploité: Ronson tenant sa Les Paul dans ses bras comme si elle était sa compagne.
L’équipe change: seul demeure Trevor Bolder (Mike Garson & Ansley Dunbar ne figurant respectivement que sur un et trois titres) et, même si Ronson tient de nombreux emplois, d’autres musiciens assurent le soutien, notamment Jeff Daly au saxophone et Richie Dharma à la batterie.
Bon! la face A est supérieure à la face B et les reprises sont plus nombreuses que les compositions — six contre trois —, mais c’est un album attachant, et, cette fois, Ronson s’est (presque) débarrassé du fantôme de Bowie. Commençons par la face A...
Le premier titre, “Billy Porter” (signé entièrement par Ronson) est un pur bonheur! Une chanson au tempo joyeux et désinvolte — quelque chose comme le «hé, ho, on revient du boulot» des sept nains dans “Blanche-Neige” —, débordante de fantaisie et de vitalité. Suit “Angel n° 9”, un titre de Craig L. Fuller qui se trouve sur “Bustin’ Out”, le 2ème album de Pure Prairie League (1972), sur lequel Ronson préside aux arrangements: un titre amorcé par un riff fulgurant, une giclée de rock ‘n’ roll moitié fuzz moitié wah-wah, qui se répand ensuite en une pâte onctueuse, rappelant un peu le “Hey Jude” des Beatles, et déborde de ferveur soul avec son commando de gisquettes déléguées aux répons. La tension s’apaise avec “This is for you”: une tendre et somptueuse ballade (guitare sèche) où les accords ruisselants du piano de Garson et le faux-bourdon des chœurs font merveille. C’est une chanson de Laurie Heath, chanteur, guitariste, membre des New Seekers, puis de Milkwood, mais je ne sais quand elle a été composée. Le rock ‘n’ roll revient en force et la marionnette Ziggy hoche une dernière fois la tête avec “White light/white heat” (Lou Reed... l’Hammersmith Odeon en 1973). Une reprise sauvage, décadente, explosive: Ronson injecte ses doses de vitriol, Ansley Dunbar matraque le tempo. Passons à la face B...
Signé Mick Ronson/Bob Sargeant, “Play don’t worry” s’annonce à pas feutrés, prend des couleurs comme galvanisé par une ration de kryptonite, puis navigue comme un steamer sur des flots nonchalants. Les paroles exposent avec lucidité le phénomène du succès: «Don’t you know it’s big business, To be a big hit band, Your potential’s enormous, Don’t you eat right out of their hands, Keep on playing right now I wish you would, Yeah keep on playing right now I think you should». “Hazy days” est dû au seul talent de Ronson. Il délivre là une autre ritournelle décontractée, fleurie de piano, de chœurs futés, de la-la-la et de sifflements insouciants. Un laisser-aller que s’emploie à redresser “The girl can’t help it”, une version jubilatoire et frénétique du standard de Bobby Troup: défoulement de studio auquel participe Ian Hunter. Ronson nous gratifie une fois encore de cuisantes ondées tandis que le saxophone exulte et s’égosille. “The empty bed” est le titre le plus romantique et le plus surprenant, c’est une reprise d’une chanson de Claudio Baglioni datant de 1973, “Io me ne andrei” en italien. Après d’élisabéthains arpèges de guitare acoustique, survient la lyre des violons, baume de tendresse et de mélancolie nimbant les paroles poétiques de Mick Ronson narrant son amour déçu. Le thème de la femme s’exalte derechef dans “Woman”, chanson d’Adam Taylor (???) figurant sur le premier album de Pure Prairie League (1972): un titre du même tonneau qu’“Angel n° 9”, dotée d’un solo de gratte fervent et râpeux et d’un piano (celui de Joe Mealing) énergique et sensible.
That’s all, folks!

>
http://en.wikipedia.org/wiki/Mick_Ronson>>> “SLAUGHTER ON 10TH AVENUE” (1974)
viewtopic.php?f=3&t=1141&p=32840#p32840www.hunter-mott.com/discography/index_albums_mr.html