Cela fait bien longtemps que j’avais envie de vous faire découvrir un groupe qui connut son heure de gloire en 1970, grâce au tube imparable
« Girl, I’ve got news for you » dont je vous ai mis le lien ci-dessous. Pour les gens de ma génération, l’écoute de ce morceau déclenche un intarissable flot de souvenirs Mais quid de ses interprètes ? … rien ou presque !
Et pourtant, Mardi Gras dont on ne sait finalement que peu de choses, était un groupe talentueux dont la courte carrière (1970-1973) ne fut guère prolifique : quatre 45 tours simples + ½ et un album tenant plus de la compil’ à l’usage de celles ou ceux qui auraient raté un épisode de leur parcours fulgurant et fugace.
Lou Burgio (drums), Bob Azzara (orgue), Flip Cesario (guitare) et Noel Roward (vibes), telle était la composition de Mardi Gras, dont on disait qu’il s’agissait en fait de la réunion très opportuniste de quatre requins de studio. Je n’ai pas envie de chercher à savoir ce qu’ils sont devenus, ni ce qu’ils ont fait après le split, car à de notables exceptions près, j’ai tellement été déçu par les carrières solos que je préfère désormais garder des souvenirs propres, nets et carrés, sans me perdre dans des méandres nébuleux qui feraient pâlir leur étoile.
La semaine dernière donc, à Chambéry, j’aperçois chez un fameux disquaire, le CD tant convoité de ce groupe. 15 titres le composent si l’on y inclut les bonus. Mes SP usés jusqu’à la corde vont enfin pouvoir profiter d’une retraite bien méritée !
Avant d’aller plus loin dans mon propos, veuillez répondre s’il vous plaît par oui ou par non, aux trois questions suivantes :
1) Aimez-vous le rythm’n’blues du début des années 60, celui propulsé par Motown , Stax, etc … et qui vit débarquer les girls groups noires comme les Supremes, Martha and the Vandellas ou des artistes comme Otis Redding, Wilson Pickett, Percy Sledge Sam and Dave, les Four Tops ou Arthur Conley ?
2) Les slows de Percy Sledge ou d’Otis Redding vous font-ils craquer ?
3) Aimez-vous les Aphrodite Child’s ?
Si vous avez répondu « non » ou « ouaich …. » à 2 questions au moins, vous pouvez filer dans votre chambre et ranger vos jouets, car cette chronique vous semblera aussi palpitante que l’étude des lois organiques parues dans le Journal Officiel.
Et nous, nous continuons non dans l’organique, mais dans l’orgasmique grâce à cet album qui tourne en boucle chez moi depuis lundi.
Il débute par l’incontournable
« Girl, I’ve got news for you » dont je vous épargnerai la description puisque vous l’avez en lien. Passons tout de suite au n° 2,
« Everyday I have to cry some », vieux standard des 60’s popularisé chez nous par Claude François (« chaque jour c’est la même chose »). Mardi Gras ressuscite hardiment ce titre qu’un orgue et une rythmique fougueux mène jusqu’à son terme. Pour la petite anecdote, ce fut la face A de leur 3ème SP et l’on sait d’ores et déjà que c’est de rythm’n’blues dont il va s’agir au fil des sillons si je puis dire …
Puis,
« come along » nous emmène sur un tempo de fête foraine à la rencontre des
Tremoloes post Brian Poole Cà balance certes, ce n’est pas désagréable loin de là, mais bon, je dirai que ce « come along » représente le maillon faible du disque. Je dirai aussi que beaucoup d’artistes auraient aimé pondre un maillon faible de cet acabit …
Et nous voilà en face d’un met de choix :
« Letter of recommandation », face B du SP « Too busy thinking about my baby » dont nous parlerons plus tard. Un slow ravageur bien emmené façon Percy Sledge par un chanteur dont la voix soul fait merveille. Non vraiment, Mardi Gras ne se foutait pas de notre gueule sur les B-sides de ses singles.
« I just can’t help believing » nous emporte sur un tout autre registre qui rappelle furieusement des groupes sixties tels que
les Turtles ou les
Lovin Spoonfull. Les quatre lascars chantent ensemble tandis que les quelques fugaces riffs de guitare ne font qu’accentuer l’impression d’un medley Turtles/Lovin Spoonfull.
« Too busy thinking about my baby » le tube de
Marvin Gaye est ici traité aux vitamines. Evoquer les Four Tops n’a rien d’exagéré et parler d’une réussite totale non plus d’ailleurs.
« Hold me » lui succède. Il s’agit du tube d’un chanteur blanc de rythm’n’blues complètement déjanté,
P.J. Proby qui connut un fameux succès dans les mid sixties. A première vue, l’on peut se montrer surpris du traitement réservé à cette reprise, qui me fait immanquablement penser à un autre clin d’œil, celui des
Four Seasons qui, sous le nom de
the Wonder Who, avaient repris en 1965 de la même façon décalée « Don’t think twice » (Bob Dylan). Pour la circonstance, leur chanteur
Frankie Valli avait emprunté la voix d’un castra ….
Mais laissons la place à
« the days », B-side du SP « Everyday I have to cry some ». Encore un slow musclé, dégoulinant de rythm’n’blues, où l’orgue pleure de concert avec les choeurs. Pour résumer, c’est the Mardi Gras meet
Percy Sledge. Un chef d’œuvre.
« I was born again » fait … naître sur un tempo moyen une improbable réunion entre les
Four Tops,
Martha and the Vandellas et
Sam and Dave avec Otis Redding aux manettes. Vous voyez le tableau ? quelques éclats de guitare et de xylophone de ci de là, agrémenté d’un final « gospélisant » qui accélère toute allure.
Je passe sur le titre suivant qui n’est que la version single de « Girl, I’ve got news for you », pour aborder sa face B «
If I can’t have you » : Slow imparable une fois encore, slow rythm’n’blues intelligemment mené grâce à une section rythmique et des chœurs à l’unisson. Slow qui respire le meilleur des
Platters, la crème de
Percy Sledge, le déchirement
d’Otis Redding, la désespérance de
Ben E King. Et ce chanteur … quelle voix !!!!!!!!!!!!!!
« Give me a little sign » a la lourde tâche de lui succéder sur la track list. Face A du dernier 45 tours de ce groupe, je ne comprends toujours pas pourquoi il n’a pas plus cartonné. Traité à la « Everyday I have to cry some », « give me a little sign » est une pure réussite !
Mais voici qu’arrive sa face B
“Paris Sunshine” qui innove dans la mesure où la guitare épaule l’orgue dans l’intro et nous gratifie de surcroît d’un joli et sage solo. Slow encore, slow toujours, mais slow rythm’n’blues, voilà la différence les amis. Point de mièvrerie ici. Nous avons affaire à du couillu, du solide et la sensiblerie à 2 balles n’y tient aucune place.
« Quand on part pour l’enfer il faut faire sa prière, c’est bien, moi je donne un concert c’est mieux ». Pam, pam-pam, ainsi débute
« Sing Sing Barbara », titre interprété par
Laurent qui avait fait un joli carton au début des 70’s. Je ne m’en lasse pas. Cette gratte rythmique acoustique qui envoie la soudure surt un tempo soutenu, ces chœurs et cet orgue assurés par les Mardi Gras. Question paroles, l’allusion est double puisque Laurent fait à la fois référence à la prison de Sing Sing et au verbe chanter en anglais.
Pour la petite histoire, Laurent est un chanteur français qui a musicalement vécu par éclipses comme David Christie ou F.R. David. Né à Tunis, il a débuté en 1963/1964 sous le nom de Michel Laurent et a obtenu un joli succès avec « ma reine de Saba ». avant de revenir quelques années plus tard sous le seul pseudo de Laurent.
Et voilà que cette compil’ du groupe MARDI GRAS vient bousculer la hiérarchie de mes disques préférés, s’insérant sans crier gare dans mon top 5 favori. Mais je reste sur ma faim et m’interroge : quand réhabilitera-t-on ce groupe ? La réponse est pourtant évidente : comme tant d’autres que nous égrenons à longueur de post, jamais, hélas !.
Reste cet album et, rien que pour vous, cet extrait en lien ci-dessous.
http://www.dailymotion.com/video/x61aja ... or-y_music
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