Au fil de mes recherches, j’ai découvert certaines choses qui en viennent à me laisser penser que les labels à bootlegs ne sont pas forcément si condamnables que ça. Pas tous, en tous les cas. Car si certains volent véritablement les artistes, d’autres répondent parfois à une demande à laquelle même les musiciens sont souvent incapables de répliquer. Je sais d’ailleurs maintenant qu’il y a des musiciens qui, eux-mêmes, ne condamnent pas la réédition sans leur accord.
Il faut d’abord connaître certains facteurs :
- Dans bien des cas, les musiciens ne possèdent pas les droits leur permettant de rééditer eux-mêmes leur album. Ils doivent alors se battre avec leur maison de disques pour avoir l’autorisation de sortir un CD, doivent récupérer les maquettes, faire un travail de nettoyage, pour graver finalement 1000 copies qu’ils vendront peut-être toutes, peut-être pas. Ou ils doivent trouver un label sérieux qui acceptera de faire tout ça à leur place, ce qui est bien sûr loin d’être facile…
- Certaines maisons de disques ont été rachetées depuis les années 70. Parfois plusieurs fois. Leur catalogue peut donc être aujourd’hui la propriété de gros labels comme Universal, qui ne veulent pas investir dans la réédition d’un vieux disque peu connu.
- Les musiciens perçoivent 1 euro par CD vendu. Dans bien des cas, il ne se vendra sûrement pas plus de 1000 copies rééditées. 1000 euros à se partager quand il s’agit d’un groupe… Financièrement, le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Ces facteurs expliquent que, sans les bootlegs, nous pourrions être privés de nombre d’enregistrements qui circulent sur la toile.
Toutefois, il est évident que les Radioactive et autres Progressive Line visent pour la plupart avant tout le profit. Et, dans certains cas, c’est dégueulasse. Je reviens à celui-ci, dont j’avais déjà parlé, parce qu’il est le plus révélateur :
Savage Resurrection : Randy s’est battu avec Universal pour pouvoir sortir une réédition légale de l’unique album du groupe sur Mod Lang. Depuis, l’album a été réédité par 3 autres labels, tous illégalement (See for Mile, Progressive Line et Tapestry Records). Dans ce cas précis, c’est dégueulasse, dans la mesure où les rééditions CD ne répondent pas à une demande, et sont une copie conforme du CD réédité légalement.
Autre cas révélateur : Analogy
Akarma a d’abord réédité leurs disques sans leur accord. Mais ils ont vite plié quand le groupe a mis ses avocats sur leurs traces. Depuis, les rééditions d’Analogy par Akarma sont légales. Preuve que les musiciens peuvent parfois s’arranger avec certains labels…
Troisième cas de figure intéressant : Accolade
Le premier album d’Accolade n’a jamais été réédité. J’ai demandé à Gordon Giltrap ce qu’il penserait si un label rééditait l’album sans son autorisation. Et sa réponse est très probablement à l’image de ce que doivent penser nombre de musiciens. Gordon n’aurait aucun problème avec ça, dans la mesure où ça permettrait à sa musique de circuler encore aujourd’hui. La seule chose qui le dérangerait dans l’éventuelle réédition en bootleg, ce serait la qualité, qui pourrait être moins bonne qu’une réédition sérieuse. Il pense donc au mélomane avant tout, pas au fric.
On m’a fait justement remarquer qu’il est un peu illogique que je condamne les bootlegs et que j’encourage le téléchargement illégal, car les deux permettent finalement à la musique de voyager encore aujourd’hui à travers le Net. Ce qui m’emmerde énormément, c’est que le téléchargement illégal est l’œuvre, généralement, de passionnés qui n’ont aucun but lucratif. Alors que les bootlegs sont balancés dans un but purement commercial. Ce qui me dérange, finalement, c’est qu’on puisse vouloir s’enrichir sur le dos des musiciens. Mais encore faudrait-il savoir s’ils sont si nombreux à le regretter aussi, et connaître l’avis d’un label qui réédite sans autorisation pour bien comprendre le problème. Si ces bootlegs existent, c’est parce que ceux qui détiennent les droits sur le catalogue des années 60 et 70 s’en foutent, laissent faire, ne veulent souvent pas rééditer eux-mêmes. Alors, qu’en penser ?
|