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 Sujet du message: La riposte graduée
MessagePosté: Mar Mai 06, 2008 10:14 pm 
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Article très intéressant.

Par Marc Rees PCINpact - Mardi 6 mai, 11h16

Exclusif : l’Association des Services Internet Communautaires (ASIC) qui regroupe les principaux acteurs du Web comme Google, Dailymotion, Priceminister, Microsoft, Yahoo! etc. a adressé une note à l’Élysée et Matignon, au cabinet d’Eric Besson, aux ministères de l’Industrie ou encore de la Justice.

Nous nous en sommes procuré une copie et c’est peu de le dire : elle torpille méthodiquement le projet de loi Olivennes dit Hadopi (Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet).

Les acteurs du web ignorés de l'avant-projet

Alors que l’avant-projet est toujours attendu, l’ASIC critique d’abord amèrement d’avoir été boudé dans le processus de concertation autour de l’avant-projet de loi : « L’ASIC regrette d’avoir été associée si tardivement, étant donné que le texte avait visiblement déjà fait l’objet de nombreux arbitrages interministériels ». Premier désaveu cinglant pour ce projet qu’on présentait à Paris comme une parfaite synthèse des positions des principaux acteurs...

Une riposte qui est tout sauf graduée

Deuxième salve : la riposte graduée. Ce système défendu bec et ongle par les majors et par le ministère de la Culture consiste à envoyer d’abord des courriers d’avertissements.

Ces lettres sont adressées non aux présumés « pirates » mais, nuance, aux titulaires d’un accès à l’Internet soupçonnés d’avoir servi à télécharger du contenu. En cas de persistance du piratage, elles sont suivies d’une coupure d’accès, et donc une mort numérique de tout un foyer. Or, l’Asic a bien noté que les partisans de la riposte tordent la réalité et minimisent la dangerosité de ce processus pour le présenter sous son meilleur angle : celui de la douce prévention, non de la sèche sanction.

« Sur le principe même de cette approche, l'ASIC appelle à ne pas minimiser la portée de cette sanction, attaque-t-elle, bannir, même temporairement, des internautes de la société de l'information, ce n'est pas seulement les empêcher de télécharger des contenus illicites, c'est aussi et surtout leur interdire toute utilisation d’un vecteur de communication et d'expression devenus indispensables, qui offrent l'accès à une pluralité d'information, à une diversité de contenus, ou à une multitude de services publics ». Et l’association ne se prive pas de rappeler la condamnation de la coupure d’accès par le Parlement Européen.

Conclusion : « il importe que tout mécanisme de sanction soit strictement proportionné au but à atteindre ». Un objectif donc, non atteint par le projet Olivennes/Hadopi.

Risques de morts économiques et sociales

L’Asic souligne d’ailleurs d’autres risques qui avaient déjà été mis en lumière dans le passé : voir des sociétés privées ou des administrations publiques et des collectivités locales être coupées d’internet du fait des téléchargements effectués par leurs salariés ou agents publics. « On imagine par exemple les conséquences économiques d’une suspension prononcée à l’égard de PME, dont les systèmes ne peuvent être sécurisés à 100% ». De la mort social d’un foyer, on glisse à la mort économique de toute une structure.

Cette réponse graduée « n’est pas neutre et ne constitue pas un simple agencement de procédure ou de transfert de compétences. Elle affecte bien le fond du droit » souligne l’Asic qui évoque sans mal les grands principes fondamentaux comme l’accès au web, la liberté de communication et d’expression, le droit au respect de la vie privée, la liberté d’entreprendre, les droits aux recours et garanties procédurales. L'ASIC appelle donc à la vigilance des pouvoirs publics sur ces questions avant l’irréparable.

Multiples attaques contre le texte Hadopi

Pour résumer, voilà l’essentielle des critiques contre le mécanisme dit de la riposte graduée, qui a été éclairé par ces acteurs du Web. On découvrira quelques surprises puisque la riposte graduée n'est ni graduée ni exclusive d'autres sanctions : - La riposte est disproportionnée : « cette sanction n’a jamais été envisagée pour les délits les plus graves, et notamment les atteintes aux personnes commises sur l’internet » ; la suspension de l’accès à l’internet ne peut être ordonnée que par un juge : le Conseil constitutionnel a rappelé à plusieurs reprises qu’une autorité administrative indépendante ne peut pas prendre des mesures « privatives de liberté ».


- Le mécanisme mis en œuvre ne respecte pas les droits de la défense et la présomption d’innocence : les sanctions (avertissements ou suspension de l’accès) pourront être prononcées suite à une simple plainte d’un titulaire de droits, sans recueillir l’avis du titulaire de l’accès. Par ailleurs, les causes exonératoires demeurent inapplicables et le texte n’impose pas de rechercher l’élément intentionnel, violant ainsi les principes constitutionnels

- La riposte n’est pas graduée : le texte ne prévoit pas l’obligation de gradation dans les mesures mises en œuvre (avertissement par courriel, par lettre recommandée, suspension de l’accès). Chacune des étapes demeure facultative et à la discrétion de la Haute Autorité

- Le projet de loi crée un mécanisme de double peine : si la Haute Autorité sanctionne le titulaire d’un accès à internet utilisé pour commettre des actes de contrefaçon, il ne s’agit que de la première sanction. C'est une petite bombe que voilà puisque la haute autorité aura l'obligation de notifier au ministère public les délits dont elle a connaissance.

Elle devra donc dénoncer le titulaire d’accès qui pourra faire l’objet de poursuite. Résultat : outre la coupure de la ligne internet du foyer, le titulaire sera en plus poursuivi pour acte de contrefaçon. D’une riposte graduée, on passe à une attaque massive. « La « riposte graduée » n’est destinée à sanctionner que le titulaire de l’accès à l’internet pour ne pas avoir sécurisé son poste informatique et/ou sa connexion internet. Elle n’empêche donc pas des poursuites tant civiles que pénales sur le terrain du partage de fichiers musicaux ou vidéo. Ces poursuites seront facilitées par l’intermédiaire de l’identification de l’auteur des faits par la Haute Autorité. »

La Haute Autorité, un organe sous haute influence

L’Asic ne s’arrête pas en si bon chemin. Sur l’institution de la Haute Autorité chargée d’orchestrer la riposte graduée, elle demande à ce que cette autorité soit vraiment indépendante et donc que ses agents ne soient pas nommés par le ministère de la Culture, dont on connaît la proximité ou la dépendance avec les ayants droit. Des mesures spéciales doivent en outre être instituées pour identifier et rendre publics d’éventuels conflits d’intérêts entre ses membres et une partie dont le dossier serait examiné.

Mieux, au regard des pouvoirs de l’Hadopi, l’Asic estime que « la Haute Autorité n’étant pas une autorité judiciaire, elle ne peut pas prendre « toute mesure » propre « à faire cesser ou à prévenir une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne ». Il convient à cet effet que la Haute Autorité renvoie cette mission au juge des référés ».

Nous indiquions hier que le calendrier d'adoption du projet de loi Olivennes risquait bien d’être contrarié. Alors que le Snep estime que le texte arrivera le 15 mai en conseil des ministres pour une première lecture au Sénat fin juin ou en juillet, ces critiques de l’Asic montrent une nouvelle fois l’ampleur de la tâche. Selon nos sources proches du dossier, le Conseil d’État n’a toujours pas rendu son avis sur l’avant-projet Olivennes et les dangers de ce chantier risquent fort de contrarier le calendrier bien huilé rêvé par l’industrie du disque.


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MessagePosté: Mar Mai 06, 2008 10:28 pm 
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La suite qui fait peur...

Projet Hadopi : de la riposte graduée à la riposte accélérée

Par Marc Rees PCINpact

Le site la Quadrature du Net vient tout juste de poster la version du projet Olivennes telle que soumise au Conseil d’État. C’est ce texte qui fait l’objet de toutes les attentions et qui présente la version la plus aboutie de la loi dite Olivennes. Le texte fait en tout 25 pages et a « pour ambition de faire cesser l’hémorragie des œuvres culturelles ».

Cette version pourra évidemment être modifiée avant sa présentation au Parlement, mais elle montre déjà une certaine évolution par rapport aux versions antérieures.

La riposte graduée, renversée

L’une des principales modifications est que, lorsqu’elle est saisie d’atteintes aux droits d’auteur, la commission de protection des droits aura le choix de la riposte. En cas de manquements répétés à l’obligation de sécurisation de la ligne internet, elle pourra ordonner directement la suspension de l’accès Internet pour une durée d’un an assortie de l’impossibilité, pour l’abonné, de souscrire une offre chez un FAI concurrent. Selon la version du texte, il ne sera pas nécessaire de respecter les deux premiers étages de la riposte graduée (mail puis LRAR) et le caractère répété des manquements s’appréciera sur une période d’une année. Qu'est-ce que ce caractère répété ? Deux téléchargements de MP3 devraient en théorie pouvoir justifier une coupure, puisqu'il y a répétition.

Du jour au lendemain, M ou Mme Dupont pourra donc être déconnecté si sa ligne internet a servi plusieurs fois à télécharger sur eMule... Ces mécanismes confirment les critiques de l’ASIC que nous révélions en exclusivité ce matin et promettent de grosses économies dans le traitement de masse du piratage apparent.

Transaction : de 1 à 6 mois de coupure

Dans cette procédure, il pourra y avoir transaction entre le titulaire de la ligne et la Commission afin d’éviter le coup de ciseau. La carotte au lieu du bâton : la suspension de son abonnement internet pour une durée plus courte, d’un mois ou de six mois. S’il refuse : c’est un an de mort numérique. Maigre consolation, son téléphone et sa télévision par IP devront continuer de fonctionner. D’ailleurs, il aura l’obligation de payer son abonnement internet plein pot, comme si rien ne clochait. « Cette suspension n’affecte pas le versement du prix de l’abonnement au fournisseur du service, car celui-ci ne doit pas assumer les conséquences d’un comportement dont la responsabilité incombe à l’abonné » dit en des termes guillerets l’avant-projet.

Le filtrage de masse confié à une autorité dite indépendante, non à un juge

La Haute Autorité pourra demander aux intermédiaires techniques, « de prendre (…) toute mesure propre à faire cesser ou à prévenir une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne ». En clair, à filtrer un contenu qu’un ayant droit ne veut pas voir sur le web. Cette mission « extraordinaire » est actuellement dévolue au président du tribunal de grande instance statuant sur requête qui se verra donc dessaisi. Pour les ayants droit, c’est l’assurance d’une procédure rapide, discrète, bien huilée et surtout très économique, et pas seulement au regard des droits de la défense.

Coupure + peine civile + peine pénale : la riposte multipliée

Un abonné dont la ligne a servi au piratage et qui a donc été suspendu, pourra être en plus poursuivi au pénal (sanction) comme au civil (réparation des ayants droit). C’est là la double (triple) peine que nous évoquions ce matin et qui donne une saveur de plomb à la riposte qu’on pensait graduée.

Des abonnés délaissés, experts en sécurité

L’article 22 de l’avant-projet enlève une belle épine des pieds des FAI. Ils ne sont plus obligés de fournir des dispositifs pour permettre aux abonnés de sécuriser leur ligne. À eux donc de se débrouiller seuls. Monsieur Tout-le-Monde devra maîtriser au mieux la sécurisation du protocole Wifi…

Un abonné d’une ligne qui a servi au piratage pourra toujours échapper à la riposte graduée s’il prouve qu’il a utilisé des moyens de protections efficaces contre le piratage ou s’il démontre qu’il y a eu contournement de ces protections par un tiers ou en cas de force majeure. Des preuves très complexes à apporter, on s’en doute, pour le simple particulier qui ne parvient même pas à sécuriser sa ligne.,

De son côté, la Quadrature du Net demande « instamment à François Fillon d'intervenir pour que les institutions de la République cessent de se déshonorer et de perdre leur temps et l'argent du contribuable à essayer de rendre acceptable ce projet par des artifices rhétoriques ».


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