J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 6 févr. 2025 05:20

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Keith Jarrett, Gary Peacock, Paul Motian – The Old Country (More From The Deer Head Inn) – (2024)

On le sait, Keith Jarrett a dû déposer les armes, mais il a fait tant de choses dans sa vie, joué tant de musique, qu’il est loin le jour où ne sortiront plus d’inédits. « The Old Country » par exemple a été en fait enregistré le seize septembre quatre-vingt-douze, les petits mots entre parenthèses ajoutent même une précision d’importance, « More From The Deer Head Inn ».

C’est que « L’auberge à la tête de Cerf » a été importante dans la vie de Keith Jarrett, c’est en effet à cet endroit qu’à l’âge de seize ans, il joua pour la première fois en trio, son « premier travail sérieux », confie-t-il. Le lieu, à Allentown en Pennsylvanie, possède une histoire, car c’est l’un des plus vieux clubs des Etats-Unis, il s’y joue concerts et spectacles depuis mille neuf cent-cinquante.

Cet album possède une autre singularité, c’est que Keith a créé un trio qui s’est produit à partir de mille neuf cent quatre-vingt-trois, jusqu’en deux mille quatorze, pour jouer principalement les pièces du répertoire américains, ces fameux standards qui depuis parcourent le monde. Le trio habituel est formé par Keith, le bassiste Gary Peacock et le batteur Jack DeJohnette, or, sur cet album-ci Paul Motian est le batteur, ce qui constitue une rareté notable.

« The Old Country » est donc formé de standards qui ne parurent pas à l’époque sur l’album « At The Deer Head Inn », sorti en quatre-vingt-quatorze, sur ECM bien sûr. Paul Motian et Jack DeJohnette sont, bien entendu, deux grands batteurs, mais au style différent, il me semble que Motian est sans doute plus elliptique et plus léger, alors que DeJohnette est plus dense et démonstratif, mais les deux possèdent un toucher rare et exceptionnel.

C’est donc le troisième « grand », Gary Peacock, qui fait ici l’unité avec keith Jarrett. Il y a dans le répertoire présenté ici de quoi faire la revue de quelques titres « totems », appartenant désormais au jazz, après avoir parcouru les « charts » et les rues de Broadway. On pourrait citer « Straight No Chaser » de Monk, « Someday My Prince Will Come » que reprit Miles Davis, « How Long Has This Been Going On » de Gershwin, ainsi que deux titres de Cole Porter, « Everything I Love » et « « All of You », il faudra donc ajouter « The Old Country » de Nat Adderley, superbe titre teinté de blues !

Il est possible que certains minorent ces albums de reprises, pourtant il y en a de magnifiques, et celui-ci fait partie très certainement des réussites, mais il me faut bien reconnaître que je ne connais pas l’album de quatre-vingt-quatorze, mais l’écoute de celui-ci donne envie, d’autant qu’il est rempli à raz-bord.

A savourer !

Everything I Love (Live)
The Old Country (Live)
How Long Has This Been Going On (Live)
Straight No Chaser (Live)
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Message par Douglas » ven. 7 févr. 2025 04:11

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George Benson – Beyond The Blue Horizon – (1971)

Quand on connait George Benson, il n’y a aucune surprise à le découvrir sur le label « CTI » qui semble fait pour lui, d’ailleurs Creed Taylor savait qu’il pouvait compter sur le guitariste quand il créa son label. Il lui laissa donc une très grande liberté pour cet album, bien lui en a pris, car il est excellent.

Les musiciens sont tous de premier ordre, Jack DeJohnette à la batterie, Ron carter à la contrebasse, Clarence Palmer à l’orgue ainsi qu’Albert Nicholson et Michael Cameron aux percus. Avec une telle section rythmique les arrières sont assurés.

Ça roule parfaitement dès « So What » une reprise de Miles Davis, George se souvient qu’il joua dans sa formation, sur « Miles in the Sky », où il excelle sur le titre « Paraphernalia ». Ici la pièce est très groovy avec une basse grondante et une batterie montée sur ressorts qui envoie sévère. Benson se lâche hachement et la pièce vrombit quand la guitare s’écharpe avec l’orgue.

Une autre reprise en seconde position, « The Gentle Rain » de Luiz Bonfá, plus traînante avec sa mélodie addictive, les percus et l’assise de DeJohnette assurent une rythmique efficace qui va avec cette ambiance « Brazil » qui s’instaure, puis c’est au tour de Clarence Palmer de faire chanter son orgue, dès que la guitare fait place !

L’album contient cinq pièces et les trois suivantes sont des créations du compositeur George Benson qui s’affichent sur la face B. « All Clear » est assez chouette avec le jeu bourdonnant de Carter et la guitare de Benson qui cavale avec une agilité folle.

« Ode to a Kudu » est une ballade pleine de coolitude, reposante et même méditative, qui prend le temps, Carter bourdonne encore avec ses nappes en toile de fond… La troisième pièce, « Somewhere in The East » voit dialoguer les percussionnistes lors de l’intro, bientôt rejoints par le reste de la rythmique, puis les deux solistes s’insinuent dans la trame, la pièce, un peu inquiétante, est toutefois bien réussie, délivrant ce qu’il faut de suspens…

Alors oui, on peut parler de soul/groove, mais pas que, c’est ce qui fait le charme de cet album qui n’a, en fait, rien d’anecdotique.

George Benson (1971) [SO WHAT]
Ron Carter - The Gentle Rain - from Beyond the Blue Horizon by George Benson
All Clear
George Benson - Somewhere in the East
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Message par Douglas » sam. 8 févr. 2025 03:29

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Chautemps – Chautemps #06 – 1988

Jean-Louis Chautemps ne possède pas une discographie pléthorique, au moins sous son nom, quelques albums seulement, c’est même un peu ridicule quand on pense au musicien qu’il fut, on peut dire de lui qu’il était souvent dans les bons coups et une figure importante du jazz français. Il a joué avec des tas de gens, d’abord Claude Bolling puis Jeff Gilson ou Martial Solal, pour situer, mais aussi avec quelques légendes, et là son panel est imbattable pour un jazzman français, Sidney Bechet, Django Reinhardt, Zoot Sims, Lester Young, Bobby Jaspar et même Albert Ayler…

Il a obtenu également le grand prix de l’Académie du disque Charles Cros avec l’album « Mad Sax 2» qu’il a enregistré avec « Le Quatuor De Saxophones », en compagnie de François Jeanneau, Jacques Di Donato et Philippe Maté. Il est décédé en deux mille vingt-deux à l’âge de quatre-vingt-dix ans.
Pour tout dire je ne savais même pas que cet album existait, avant que je ne tombe dessus. J’ai la réédition avec cette magnifique pochette où son portrait est dessiné au crayon, peut-être par Jérôme Wiltz qui est cité au graphisme.

Il y a quatorze pièces, plutôt courtes et surtout très écrites, mais en jazz il y a toujours, c’est la règle, un espace dédié aux solos. Il y a également beaucoup de monde, Jean-Louis joue évidemment des saxophones, Kenny Wheller est à la trompette, Denis Leloup au trombone, Jannick Top à la basse électrique, Yves Torchinsky à la contrebasse, André Ceccarelli à la batterie et François Verly aux percussions, par ailleurs, Jean-Louis joue un duo avec Martial Solal au piano sur la pièce « Sur and Sue Helen », à classer rayon pépite.

Toutes les pièces sont écrites par Jean-Louis et l’album contient un peu moins de cinquante minutes de musique, de quoi bien pénétrer dans son univers propret, c’est écrit à la perfection et très virtuose avec des audaces ici où là, mais pas de free, plutôt dans les arrangements et l’écriture.

Il croque des ambiances, des scènes presque cinématographiques qu’il piège dans ses notes, sa musique suscite des images, des lieux, des climats ou des sensations, comme sur « Austere Pattern », « On The Sonic Side Of The Mac » ou l’inattendu « Pour Autant Que le Principe du Rasoir d'Occam », à ce stade il faut noter qu’il a été membre du Collège de « Pataphysique ».

C’est le genre d’album dont on ne se sépare pas facilement…

On The Sonic Side Of The Mac (Instrumental)
Austere Pattern (Instrumental)
Jean-Louis Chautemps avec Martial Solal - Sur and Sue Helen - 1988
Om-Zoom-Pham (Instrumental)
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Message par Douglas » dim. 9 févr. 2025 04:11

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Billy Cobham – Total Eclipse – (1974)

Je ne me rappelle plus comment a été accueilli ce troisième album de Billy Cobham, mais je suppose plutôt bien car il est réussi, mieux que beaucoup d’autres dans ce genre, d’évidence. Dès le début de « Solarization », une suite en cinq mouvements d’environ onze minutes, on entend John Abercrombie qui envoie efficace, et marque de son sceau le territoire.

Puis arrive « Second phase » la deuxième partie de la suite où c’est le pianiste Milcho Leviev qui laisse sa marque, avant que Randy Brecker et son bugle ne prennent la suite et que revienne Abercrombie, dont le retour, chargé d’électricité, se déverse à nouveau à nos oreilles attentives… c’est superbe !

Cette suite résume bien l’entièreté de l’album qui brille de ces feux-là, avec un Cobham précis et acéré qui mène l’affaire d’une main de maître, alignant les compos qu’il a lui-même écrite, avec un feeling tout particulier et une direction d’ensemble habile et efficace. On entend également le frère de Randy Brecker, Mike qui joue des saxs ténor et soprano ainsi que de la flûte. Pour n’oublier personne le bassiste, électrique bien sûr, est Alex Blake.

Toujours sur la face une, on remarque le titre « Total Eclipse », d’accès évident, qui signe cet album avec les caractéristiques d’un tube potentiel, mais c’est le dynamique « Bandit » qui marque la fin de cette première face.

La face B s’ouvre avec un titre qui sera un des sommets des concerts de la formation, « Moon Germs », à la fois funky et jazzy, qui permet à nouveau à John Abercrombie de marquer son territoire, aidé dans sa tâche par un invité, Cornell Dupree, qui signe le premier solo de gratte. Côté rythmique David Earle Johnson ajoute les sons de la conga, la pièce se termine presque malgré elle, on sent que lors des tournées il y a là matière à fournir un titre idéal pour faire surgir quantité de solos…

Arrive le court intermède, avec Billy Cobham qui joue quelques notes au piano avec Brecker qui tricotte… « Sea Of Tranquility » est la pièce la plus longue elle frôle les onze minutes, plutôt cool elle avance en saccades, ce qui lui permet de conserver son rythme mid-tempo et de laisser un bel espace au sax de Mike Brecker, puis au Rhodes de Milcho Leviev, une pièce qui s’énerve tout en planant…

Reste encore « Last Frontier » où Cobham use du re-recording pour mélanger son puissant jeu de batterie avec son plus minimaliste mais cohérent jeu de piano, histoire de déposer sa signature. Un troisième album de suite où rien n’est à jeter, bel effort du batteur compositeur, sans faille et sans faiblesse, à suivre…

Billy Cobham Solarization
Total Eclipse
Sea of Tranquility
Last Frontier
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Message par Douglas » lun. 10 févr. 2025 03:26

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Pat Martino – All Sides Now – (1997)

« Les voies du destin sont impénétrables » aime à répéter le croyant lorsque le malheur frappe avec une cruauté aveugle, une de ces phrases inventées pour accepter les frasques de la fatalité, et les injustices cruelles qui touche les humains, victimes du malheur et du hasard.

C’est un peu ce qui est arrivé à Pat Martino, en effet en mille neuf cent quatre-vingts un caillot est décelé à l’intérieur de son cerveau, il est menacé d’une rupture d’anévrisme, l’opération qui suit est réussie mais sa mémoire a disparu, il réapprendra à jouer de la guitare en écoutant sa propre œuvre, peut-être existe-t-il une mémoire cachée dans les mains, toujours est-il qu’il reviendra au-devant de la scène…

Certains diront qu’il ne récupérera jamais l’entièreté de son talent, mais ça ne l’empêchera pas d’enregistrer quelques beaux albums, comme celui-ci sur Blue Note, en quatre-vingt-dix-sept. Il joue en compagnie de ses pairs, c’est le principe de l’album où les invités défilent en enregistrant chacun un titre avec le grand Pat.

Dix titres sont joués, des duos, trios ou quartets, pas seulement guitaristes, car lors de la sixième pièce, « Both Sides Now » il accompagne la chanteuse Cassandra Wilson sur cette compo signée Joni Mitchell. Mais ce sont bien entendu ses échanges avec les autres guitaristes qui impressionnent davantage.

Il en est de très célèbres comme Kevin Eubanks sur « Progression », Les Paul sur « I'm Confessin' (That I Love You) », Joe Satriani sur deux pièces, « Ellipsis » et « Never and After » dernier titre de l’album, il y a aussi Mike Stern qui intervient par deux fois, sur « Ayako » et « Outrider », deux belles réussites ici. Pour n’oublier personne il y a également Charlie Hunter sur le titre d’ouverture, « Too High » de Stevie Wonder, et Tuck Andress sur le titre suivant, « Two Of A Kind ».

D’évidence il n’y a pas forcément une grande cohérence comme sur un album plus classique, mais le projet conserve la couleur essentielle, avec en son centre un bel hommage à la guitare, mais aussi à la voix car le titre chanté par Cassandra Wilson est très touchant.

Ce qui est étrange ici, c’est que tous ces guitaristes qui défilent ici se sont inspirés de Pat Martino et viennent ici lui rendre hommage et remerciement, mais ce Martino ancien est peut-être disparu et enfoui dans le temps, au profit d’un guitariste plus jeune et moins chevronné qu’eux-mêmes, une histoire de fou…

On pourrait évoquer Chet Baker qui dût réapprendre à jouer de son instrument, après s’être fait casser les dents suite à un tabassage en règle, mais celui-ci conservait le souvenir entier de son passé…

Too High
Ayako
Outrider
Both Sides Now
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Message par Piranha » lun. 10 févr. 2025 05:53

Légende, Pat Martino

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 11 févr. 2025 03:44

Oui, très impressionnant ce Pat !
:amen:
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 11 févr. 2025 03:57

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Billy Bang Quintet Featuring Frank Lowe – Above & Beyond: An Evening In Grand Rapids – (2007)

Voici la retransmission d’un concert via un portable et un bon logiciel, ce vingt-huit avril deux mille trois, à l’Institut Urbain de l’Art Contemporain à « Grand Rapids » dans le Michigan. La date a son importance, car l’un des amis les plus proche du violoniste Billy Bang, le saxophoniste ténor Frank Lowe est à son poste, malade, il n’a plus qu’un poumon et joue là, semble-t-il, son dernier concert. Il émettra le souhait auprès de Billy, que ce concert soit publié, il décèdera le dix-sept septembre suivant.

Frank Lowe fait partie des grands saxophonistes de cette période, on le voit ici, bien que diminué, jouer encore avec excellence, compensant par une très grande justesse et un à propos remarquable, même si d’évidence il est moins volubile qu’au moment de sa jeunesse. Si Billy bang figure au recto de l’album c’est Frank qui est au verso, accroché à son saxophone.

Le concert est magnifique et le témoignage qui en résulte est remarquable. Andrew Benkey est au piano, Todd Nicholson à la basse et Tatsuya Nakatani à la batterie, les cinq sont très en connivence et chacune des quatre pièces qui sont jouées est fantastique, même si on pense en tout premier au magnifique « Dark Silhouette » de vingt-quatre minutes qui semble être le « cheval de bataille » ici.

La pièce est très prenante, lyrique et viscérale, avec Billy qui tord les notes de son violon et en râpe les cordes, mais en joue également comme d’une guitare, en les pinçant. Benkey au piano maintient la tension avec l’habileté qui convient, plaquant des accords distordant et dramatiques.

Quand Frank Lowe intervient, soutenu par la batterie et la basse, sur un rythme répétitif, il joue sa partie avec un éventail réduit de notes précises, celles qui font la musique, mais il utilise les notes en flots également, les noyant dans des sortes de coulées comme il sait le faire, jusqu’au feulement qui suggère et s’ébroue, salué par le public qui applaudit.

Le ton de l’album est plutôt grave et concentré, mais la pièce suivante, « At Play In The Fields Of The Lord » est lyrique et moins recueilli, sans doute parce qu’il est question de jeu et de détente, même dans le cadre du sacré. A nouveau une belle pièce avec un Billy bang qui maîtrise son art avec une grande classe. L’album est plein à raz-bord de plus de soixante-cinq minutes d’une merveilleuse musique et cette dernière pièce le clôt de belle manière…

Silent Observation (Live)
Nothing But Love (Live)
Dark Silhouette (Live)
At Play in the Fields of the Lord (Live)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 12 févr. 2025 04:50

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John Coltrane – Settin' The Pace – (mars 58)

Nous voici lors de la session du vingt-six mars mille neuf cent cinquante-huit, sous la supervision de Rudy Van Gelder, dans les célèbres studios d’Hackensack, pour le compte du fameux label Prestige qui enchaîne les enregistrements. Celui-ci ne paraîtra que bien plus tard, la première version en mono, sortira pendant l’année soixante et un.

Alors Coltrane, bien sûr, mais aussi le Red Garland trio, avec Red au piano, Paul Chambers à la contrebasse et Art Taylor à la batterie. Ils se connaissent et s’apprécient, sont habitués ensemble et chacun possède ses marques.

Comme à l’habitude le répertoire est constitué d’airs populaires, de ceux que chacun connaît et chantonne à l’époque. Les deux premiers titres qui siègent face une sont tous les deux signés par les compositeurs « Dietz & Schwartz », des habitués des shows de Broadway très en vogue alors.

Ainsi l’album s’ouvre sur une ballade, « I See Your Face Before Me » de près de dix minutes, immortalisée par Franck Sinatra. Après une intro au piano, Coltrane se montre extrêmement tendre et caressant, libérant un solo de saxo extrêmement long, affichant une progression remarquable, très fouillée déjà, avant de laisser la place au piano de Red Garland, après quatre minutes et vingt secondes.

La ballade avance en conservant ce même tempo avec la rythmique qui reste dans la même structure, mais deux minutes plus tard Paul Chambers se saisit de l’archet et risque un solo, avant que Coltrane ne reprenne la main pour une nouvelle variation finale… J’avoue que j’aime bien ce genre de ballades dont Coltrane colorait le plus souvent chacun de ses albums à l’époque.

La seconde pièce, « If There Is Someone Lovelier Than You » est toujours aussi philosophique et plaisante, cette fois-ci le titre est mid-tempo, dans un style que Coltrane aime beaucoup à l’époque, et dont il use à foison.

La pièce suivante est sans doute plus remarquable, signée par Jackie McLean, elle se nomme « Little Melonae ». C’est peut-être la pièce la plus ciselée ici, en tout cas la plus originale où chacun grimpe d’un niveau, c’est aussi la plus moderne avec sa curieuse mélodie et ses harmoniques complexes. On sent poindre ici le génie coltranien, dont les solos sont décapants. C’est aussi la pièce la plus conséquente, flirtant avec le quart d’heure.

L’album se termine avec « Rise ‘N’ Shine », une pièce très rapide et très enlevée où tout s’emballe et se bouscule, la virtuosité des musiciens est mise à l’épreuve, mais pour ces kadors il n’y a ni risque ni péril, tout est en place et la course peut s’élancer ! A noter qu’au fil des rééditions, l’album s’est parfois appelé « Trane's Reign ».

I See Your Face Before Me by John Coltrane from 'Settin' The Pace'
If There Is Someone Lovelier Than You by John Coltrane from 'Settin' The Pace'
Little Melonae by John Coltrane from 'Settin' The Pace'
Rise 'N' Shine (RVG Remaster)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Monsieur-Hulot » mer. 12 févr. 2025 07:53

Merci Douglas, je ne connais pas ces morceaux, Trane est vraiment un ovni !!!!
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 12 févr. 2025 18:14

Monsieur-Hulot a écrit :
mer. 12 févr. 2025 07:53
Merci Douglas, je ne connais pas ces morceaux, Trane est vraiment un ovni !!!!
Ce petit voyage aux couleurs "sépia" dans la discographie la plus discrète de Trane, permet de mettre à jour quelques beautés cachées qui risqueraient autrement de rester trop oubliées...

Ce n'est qu'en fin de parcours que je risque ce beau voyage, après m'être gavé des trésors Impulse, des successeurs et des descendants...
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 13 févr. 2025 05:24

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Donald Byrd – Byrd In Hand – (1959)

« Byrd In Hand » est un album enregistré le trente et un mai, et dans les bacs dès le mois de décembre de cette année cinquante-neuf. C’est qu’il possède une légère particularité qui se loge dans sa musique. Classé « hard bop » car dans l’air du temps, il garde cependant, le temps de quelques titres, un penchant tout particulier pour le « cool jazz » qui se marie bien avec le goût de Donald Byrd pour les chouettes mélodies et les belles harmonies.

Dès « Witchcraft » le titre d’ouverture signé par « Leigh & Coleman » la magie s’installe avec ce titre mid-tempo. Byrd ouvre, soutenu par la basse chantante de Sam Jones et le druming subtil d’Art Taylor, bientôt rejoints par le piano de Walter Davis qui fait des grâces, jusqu’à l’arrivée du grand Charlie Rouse au sax ténor, sur du velours il succède à l’avant à Byrd, puis cède gentiment la place à Wynton kelly qui balance doux également, Charlie revient quelques mesures avant de laisser à nouveau la place à Donald Byrd, alors qu’au fond gronde gentiment la grosse voix du baryton de Pepper Adams. Le décor est planté et le charme opère déjà : voilà un album qui annonce de grandes choses.

Arrive alors deux titres successifs de Donald Byrd, le premier « Here am I » s’annonce avec un court et merveilleux thème qu’il joue en compagnie du baryton, et cette coolitude balancée qui nous était promise arrive bien à l’heure. Donald joue les notes simples, bien détachées et articulées, qui font le bon jazz facile à écouter, qui séduit d’emblée et garantit le plaisir lors de l’écoute, sa conversation passionnante avec Pepper Adams promets beaucoup, alors que les accords interrogatifs de Walter Davis s’imprègnent avec force dans notre cerveau toujours en attente…

Puis vient « Devil Whip », cette fois-ci on dévale la pente à fond la caisse, poursuivi dans ce train d’enfer à la mode hard bop, qui fonce up-tempo vers le grand vide, une séquence qui secoue bien… « Bronze Dance », une pièce de Wynton Kelly, envoie bien également et offre une farandole de bons solos. Mais c’est « Clarion Calls » toujours signée par le pianiste, qui vit davantage, avec un Pepper Adams rond et généreux, un Donald Byrd qui monte et descend les escaliers dessinés sur les partitions à la vitesse du cheval qui galope autour du Mont St Michel !

L’album se termine avec un autre titre du trompettiste, « The Injuns » qui envoie fort encore, un bel au revoir encore plus vif et plus pétillant, de quoi vous faire tourner la tête car la vitesse est en mode surmultiplié qui décoiffe et vous soulève votre chapeau !

A noter la prise de vue sur la pochette, effectuée dans les extérieurs des Studios Van Gelder. Un bon album donc !

Donald Byrd Sextet - Witchcraft
Here I Am (Rudy Van Gelder Edition/Remastered 2003)
Clarion Calls (Rudy Van Gelder Edition/Remastered 2003)
The Injuns (Rudy Van Gelder Edition/Remastered 2003)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 15 févr. 2025 06:44

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PainKiller – Execution Ground – (1994)

C’est l’album du « pendu », sur cette version il ne figure pas sur la pochette, mais sur la double page intérieure de cette même pochette, ainsi que sur le CD un, car deux sont présents sur cette version. La version Tzadik, avec trois Cds, est plus belle et bien colorée, et le pendu fait la pose sur la pochette avant, mais les prix sont tout de même dissuasifs.

Hormis cette histoire de « pendu » qui orne joliment, on retrouve nos trois zèbres de Painkiller, John Zorn au saxophone alto, Bill Laswell à la basse et aux samples et Mick Harris à la batterie et à la voix, car je n’ose appeler ça du chant, ainsi qu’aux aux samples également. On annonce également Yamantaka Eye au chant sur la version à trois Cds, et peut-être même d’autres invités non cités.

Côté genre musical on s’oriente vers un mélange de free jazz, de dub et de death métal, voire de grindcore. Sur l’autre Cd figure, sur le Cd, le titre « Ambient », ce qui va bien, certains ajouteront même « Dark ambient » pour préciser davantage, mais le mieux c’est d’écouter par vous-même, car ce double cd est bien sympa.

La première pièce, « Parish Of Tama (Ossuary Dub) » gagne en épaisseur en même temps qu’elle déroule, un peu plus de seize minutes plutôt bien foutues, pour peu qu’on adhère au projet. Après un départ tonitruant, mais lent et massif, du genre qui avance en détruisant tout sur son passage, avec un Zorn dont le sax crie dans la nuit, hypnotique et malfaisant, dans les dédales des ruelles sombres et inquiétantes…

Ils ne sont que trois mais semblent trois cents, une multitude qui grouille sous leurs pieds, franchement c’est ultra bien foutu. La seconde pièce, « Morning of Balachaturdasi » prolonge le plaisir pendant un petit quart d’heure encore, ambiance mortifère qui baigne dans un nuage obscur et épais d’où sortent les mauvais esprits, tourmentés et caverneux, avec des circonvolutions libidineuses et suintantes, et Mick Harris qui tape, tape encore et retape, comme un damné, du genre buté qui massacre ce qui se trouve à sa portée.

La dernière pièce « Pashupatinath » est un peu plus courte mais s’inscrit parfaitement dans la suite, avec saxo hurleur de Zorn qui gravite dans les aigus, comme des éclairs, ils strient l’espace. Pour le reste la rythmique s’inscrit dans le dub, par séquences, l’électro joue aussi sa part dans les climats en texturant le tout, avec des effets nombreux et divers, il y a évidemment des impros qui sont évidemment le sel ici…

Le second Cd dans le style ambient, propose deux versions alternatives de « Parish Of Tama (Ossuary Dub) » et « Pashupatinath » dans des versions assez noires et tout à fait agréables à écouter, plus longues que les modèles. C’est plutôt du genre séduisant et peut-être même mémorable pour les amateurs.

Un bon Painkiller et une belle étape, mais seule la version trois Cds est évidemment complète et fait référence…

PAINKILLER PARISH OF TAMA Ossuary dub 2
Painkiller - Morning of Balachaturdasi
Painkiller - Pashupatinath
Painkiller - Parish Of Tama (Ambient)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » dim. 16 févr. 2025 04:43

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Abbey Lincoln – Abbey Is Blue – (1959)

Cet album d’Abbey Lincoln, cru cinquante-neuf, est tout simplement extraordinaire. C’est son troisième pour « Riverside », en ces temps-là, la personnalité incontournable de Billie Holiday conditionnait les avis et les comparaisons ne manquaient pas de s’exercer. Il serait vain de vouloir faire d’Abbey Lincoln une disciple de la diva, tout autant que d’espérer qu’elle puisse échapper à l’attraction magnétique de la plus tragique des vocalistes de jazz.

Abbey possède la jeunesse et la fraîcheur, et l’album est tout empreint de ces grâces-là, la voix sûre et précise convient bien aux sujets que décide d’aborder Abbey lors de ses chansons, évacuant les airs traditionnels de « Tin Pan Alley », et les facilités qui vont avec.

En ce sens cet album pourrait être qualifié « d’engagé », elle chante en effet des sujets qui l’intéressent et la concernent, y compris sa condition de chanteuse de couleur, elle s’intéresse également à sa communauté et au mouvement des droits civiques.

L’album commence par le titre « Afro Blue » qui deviendra, également, un point de répertoire souvent joué par John Coltrane, la version ici est magnifique. Elle est suivie du superbe « Lonely House », sombre et déchirant, puis de « Let Up », un blues superbe, également la pièce la plus longue ici et celle qui reste ma préférée, elle me saisit à chaque écoute.

On retient encore « Laugh Clown Laugh » qui s’éclaire d’un nouveau sens si on songe aux combats civiques, il y a également « Come Sunday », une reprise de Duke Ellington qui revit sous la voix. Elle est accompagnée la plupart du temps par l’orchestre de son mari, l’excellent batteur Max Roach, Kenny Durham est à la trompette, Wynton Kelly au piano, Les Pann à la guitare ou à la flûte, d’autres musiciens interviennent également : il y eut différentes sessions.

Ce qui est à noter c’est juste la grande qualité instrumentale des accompagnements. Abbey Lincoln a évidemment enregistré d’autres très grands albums, mais celui-ci figure parmi les meilleurs, ce qui en fait une sorte d’indispensable.

Afro Blue (Remastered 1959)
Abbey Lincoln & Kenny Dorham - 1959 - Abbey Is Blue - 02 - Lonely House
Let Up (Remastered)
Laugh, Clown, Laugh (Remastered)
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Douglas
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » lun. 17 févr. 2025 05:39

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John Zorn – Lamentations – (2024)

Il est des moments où la discographie de John Zorn s’emballe d’un coup, les sorties se multiplient, dans tous les genres et venant de toutes-parts, alors la tête s’affole et un tri s’impose, impossible de faire face ou même d’entrevoir une telle possibilité. La sagesse commande de se laisser guider par son propre penchant, de picorer avec mesure, car, si abondance ne nuit pas, le temps fera son affaire…

Celui-ci date du mois d’août, et il réunit trois parmi les plus fameux guitaristes de l’époque, des habitués qui se réunissent pour la septième fois. Les magnifiques Bill Frisell, Julian Lage et Gyan Ryley. Chacun est évidemment un instrumentiste absolument exceptionnel, cela est entendu, mais bien plus que le talent de chacun, c’est la combinaison des trois qui est miraculeuse.

Sur le « obi » accompagnant, « Lamentations » est annoncé comme étant le meilleur volume de cette rencontre à trois, pour autant je ne m’avancerai pas sur ce terrain, les perles ne manquant pas au milieu de tant d’échanges, parfois à deux, et même souvent, mais aussi à trois comme ici…

La rencontre se dessine autour de l’image du poète Gallois Dylan Thomas, romantique et amateur d’alcools forts, qui laissa une marque forte et originale dans la littérature de son siècle. Quatre titres sont prétextes à ce voyage souvent épique et tendre, « With Blinding Sight », « Clown In The Moon », « Do Not Go Gentle Into That Good Night » et « Close Of Day » pour un total de près de quarante-trois minutes d’une musique qui semble couler comme du bon miel, s’échappant par grappe des guitares unifiées, se déversant comme dans un état second, en un endroit à part, hors des contingences habituelles.

La réalité de cette musique, si on s’y plonge, se déploie dans un temps « autre », un monde de l’esprit, d’une sorte de pureté rafraîchissante qui s’alimente sans cesse, parcourt de multiples territoires, passant de l’un à l’autre avec des allers et retours ou peut-être pas : est-ce un long fil que se déploie à l’infini ?

Seule la dernière pièce prend un peu de poids et s’enracine un peu…

With Blinding Sight
A Clown in the Moon
Do Not Go Gentle Into That Good Night
Close of Day
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Message par Douglas » mar. 18 févr. 2025 03:18

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Cannonball Adderley – Poppin' In Paris: Live At L'Olympia 1972 – (2024)

Voici pour la première fois la diffusion d’un concert qui se donna le vingt-cinq octobre mille neuf cent soixante-douze, au Théâtre de l’Olympia, à Paris, lors du « Paris Jazz Festival ». Cette diffusion a été récompensée par le titre de meilleure édition ancienne de l’années deux mille vingt-quatre, on ne peut en effet pas parler ici de réédition.

Cet album connaît également une sorte de « jumeau », paru également cette année, « Burnin' In Bordeaux : Live in France 1969 », avec un personnel un peu différent, Joe Zawinul parti depuis chez Weather Report est en effet remplacé par George Duke aux claviers. Il y a également Julian « Cannonball » Adderley au sax alto, son frère Nat Adderley au cornet, Walter Booker est à la basse et Roy McCurdy à la batterie.

On célèbre bien souvent Cannonball Adderley pour son extraordinaire album « Somethin' Else » de mille neuf cent cinquante-huit, classé parmi les classiques du jazz, mais Cannonball a su conserver le fil Davisien, jusqu’au moment de ces enregistrements qui respirent bon le « jazz rock » nouveau qui pétille !

Pour réunir le plus ancien et le plus moderne il y a, dès le second titre ici, « Autumn Leaves » qui fait bien le travail, après le très long « Black Messiah » de plus de vingt minutes. Je n’ai jamais placé George Duke parmi mes préférés dans ce style, mais il fait tout de même le boulot ici, représentant éminent du style alors à la mode et compositeur du titre emblématique.

Mais on goûtera aux frères Adderley qui régalent et jouent plutôt « jeunes », Julian enfourchant par exemple l’alto sur « Doctor Honoris Causa » de Joe Zawinul, gros pourvoyeur de compos ici, et Nat brillant à chaque solo, valeur sûre et gage de grande qualité.

Il y a également une bonne place accordée au jazz funky, ainsi qu’aux « totems », comme « Directions » ou « Mercy, Mercy, Mercy », de quoi passer un excellent moment à l’écoute de cet album fait pour plaire, ce qui ne manquera pas d’arriver car les musiciens sont fabuleux et l’énergie est bien là !

1 Black Messiah 00:02
2 Autumn Leaves 20:26
3 Soli Tomba 33:33
4 Walk Tall (Baby That's What I Need) 37:08
5 The Scene 41:22
Set 2
6 Doctor Honoris Causa 42:31
7 Hummin' 01:02:01
8 Directions 01:10:40
9 Mercy, Mercy, Mercy 01:14:17
10 The Scene 01:17:14

Cannonball Adderley - Poppin' In Paris (Live At L'Olympia 1972)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 19 févr. 2025 02:41

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John Coltrane – Standard Coltrane – (1958)

Cet enregistrement date de la session du mois de juillet cinquante-huit, quatre titres sont parus lors de la vague de mille neuf cent soixante-deux, qui vit mettre à jour tant de merveilles enfouies. Chacune possède ses caractéristiques et ses particularités, notamment celle-ci qui fit appel au rôle des trompettistes, en cette fin des années cinquante.

Il est indubitable qu’à l’époque, le partenaire privilégié de Coltrane pour ce qui concerne la trompette est Donald Byrd, il figure sur de nombreux enregistrements d’époque, bien que parfois, on puisse entendre également Idrees Sulieman.

Il se trouve qu’un peu avant cette période, Coltrane venait d’enregistrer en compagnie de Wilbur Harden au bugle ou à la trompette, Coltrane ayant participé en tant que sideman à trois albums sur le label « Savoy » du trompettiste, auquel il rend ici la monnaie de sa pièce.

Wilbur Harden est un musicien enjoué et sympathique, mais ne possède pas les qualités de musicien requises comme l’attesterait un Donald Byrd ou un Lee Morgan pour n’en citer que deux. C’est ainsi que cette session se tourna donc vers des titres lents, propres à mettre en valeur l’invité du jour.

Ainsi la première pièce de l’album est une ballade extrêmement lente, « Don't Take Your Love from Me », outre Harden et Coltrane on entend Red Garland au piano, Paul Chambers à la contrebasse et Jimmy Cobb à la batterie. Coltrane joue des embellissements à fond et reste toujours aussi impressionnant à écouter, même dans une telle configuration.

A l’heure des solos Harden sort également son épingle du jeu, sans véritable brio mais en restant très professionnel, il est tout de même entouré par une glorieuse équipée, il restera ainsi, jouant quelques solos ici ou là, sans jamais en faire trop, connaissant lui-même ses limites, mais s’appliquant au mieux.

La seconde ballade est « I'll Get By » un poil plus rapide, aux limites du possible. Arrive ensuite « Spring is Here » avec des arrangements un peu plus complexes qui maintiennent l’intérêt. La dernière pièce « Invitation » s’étale également, ce qui permet à Coltrane de bien fouiller le thème, comme il aime à la faire.

En définitive ces quatre « Standards » sont structurés pour faire au final un bel album, avec le saxophoniste qui y brille avec éclat, sur un enregistrement jamais médiocre, ni même « en dedans », mais il demeure assez court : un peu moins de trente-cinq minutes.

Don't Take Your Love From Me by John Coltrane from 'Standard Coltrane'
I'll Get By (As Long As I Have You) by John Coltrane from 'Standard Coltrane'
Spring Is Here by John Coltrane from 'Standard Coltrane'
Invitation by John Coltrane from 'Standard Coltrane'
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Message par Douglas » jeu. 20 févr. 2025 07:11

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Henry Threadgill & Make A Move – Where's Your Cup ? – (1997)

Quel privilège que celui de de parcourir la discographie d’Henry Threadgill, même si elle date de vingt-cinq ou trente années ! Rien n’a vieilli, ni pris une ride, tout éclate encore au monde frais et léger comme au premier jour. Cette musique est parée des plus beaux atours, avec un charme fou qui semble impérissable…

Henry joue du sax alto et de la flûte avec ce génie particulier qu’il déploie dans les compos, comme sur le merveilleux premier titre « 100 Year Old Game » qui se bâtit dans l’attente et une tension vive, qui se maintient, comme un feu couvant sous la glace, les contraires se mariant, et préservant l’énergie…

Il y a également Brandon Ross à la guitare électrique ou classique, qui déploie ses fioritures habiles, s’entrelaçant avec le flux du sax et la basse de de Stomu Takeishi qui dessine de sinueuses lignes toutes en arcanes mystérieuses et épiques, il y a de la sorcellerie dans cette musique étonnante, comme sur « Laughing Club » …

Pourtant c’est bien Tony Cedras le personnage central ici, celui autour duquel la musique s’articule étrangement, car la musique de Threadgill possède en elle ce curieux mélange de complexité et de charme étrange, qui la rend tout simplement inouïe. Avec son accordéon au son souvent « argentin », et son harmonium emphatique il crée les climats, les murs et les textures, comme un décorateur en chef, créateur d’espace dans lesquels chacun prend sa place. Le plaisir d’écoute qui se dessine souvent dans l’attente et la montée en tension fonctionne à merveille, comme l’atteste le morceau titre « Where’s Your Cup ? »

Les pièces sont plutôt longues et offrent de grands espaces aux solistes qui ont tout le loisir de s’exprimer dans la longueur, chacun ajoutant sa couleur dans cette architecture brinquebalante. Les musiques dites « du monde » siègent aisément dans cet empire symphonique à cinq, si on considère l’indispensable J.T. Lewis, batteur de son état, qui n’est pas le dernier à apporter sa graine de folie rythmique, comme sur « « And This », la pièce la plus longue ici.

C’est aussi une sacrée teuf, cette pièce incroyable qui prend son pied avec la guitare de Ross qui invente la musique d’un film extraordinaire, créant des images insensées qui vous soulèvent les sens ! Henry lui-même prolonge le délire et lui accorde une nouvelle épaisseur, quasi pharaonique et orgiaque jusqu’au dépassement total.

Si je continue à venir par ici pour déposer ma prose un peu foireuse, c’est notamment grâce à ce genre d’ovni qui maintient haut la foi, j’agite juste un peu le chiffon pour haranguer celui qui passe, holà, holà…

Soixante-six minutes et plus qu’il dure ce truc infernal, calez-vous bien les zoreilles, à cause de l’incroyable et génial « The Flew », ainsi que « Go To Far » qui prolongent sévère ce voyage sans fléchir ni jouer petit-bras, ça monte haut, tout là-haut, y stationne, s’y installe et ne redescend pas !

Quelle claque !

100 Year Old Game
Where's Your Cup?
Henry Threadgill & Make A Move- And This
The Flew
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