
Famoudou Don Moye - Ari Brown – Live At The Progressive Arts Center (1982)
En ce moment j’explore pas mal mes vinyles, rapport à cette nouvelle platine, et voilà que je tombe sur celui-ci, le premier de la lettre « F », un bout de temps qu’il ne s’est pas glissé entre mes oreilles, et même un peu oublié… Je savoure déjà, rien qu’en le posant sur le plateau, c’est la retransmission d’un concert donné au « Progressive Art Center » de Chicago, le vingt et un juin quatre-vingt-un.
Bien que la pochette ne le laisse pas paraître, ils sont en fait trois, Famoudou Don Moye comme promis à la batterie et aux percussions, Ari Brown, le saxophoniste très talentueux dont on a déjà parlé par ici, il joue du ténor, de l’alto et du soprano, le troisième laron est le bassiste Milton Suggs, très volubile ici, et essentiel, entre les deux « grands » il fait le lien et son apport est tout sauf négligeable.
La première pièce est un titre d’Horace Silver, « Peace » reconnaissable immédiatement. Son développement est un enchantement mais on s’y attendait… Ari Brown est chicagoan, il a appartenu à l’AACM après une solide formation de saxophoniste. Son style se situe à la frontière de la tradition qu’il n’oublie jamais et de la musique modale ou free avec lesquelles il fait des allers-retours.
Cet album le situe chronologiquement un peu avant qu’il ne se fixe avec le trio de Kahil El'Zabar, à une période où il collaborait beaucoup avec les musiciens de Chicago, Lester Bowie ou Anthony Braxton, par exemple. Ici il est superbe et son jeu très ouvert plaira à tous, à la fois consensuel et moderne, comme un flot qui s’écoule qui semble ne jamais vouloir s’arrêter.
Famoudou Don Moye est de la même génération, sensible au free jazz il a fait partie de l’Art Ensemble de Chicago, il sait tout faire dans son domaine, c’est un maître batteur-percussionniste qui s’est frotté à tout, et a multiplié les rencontres. Il n’y a aucune surprise à le voir au sein de ce trio, il nous offre d’ailleurs un exercice solitaire dès l’introduction de « Mobrusu » qui occupe toute la seconde face.
A l'écoute, on pourrait s'imaginer que l’on soit dans l’univers d’Archie Shepp, si ce n’était ce soprano à la place du ténor… L’association Ari Brown avec Don Moye est décidément très dense et réserve de grands moments musicaux. Mais il ne faut pas oublier le bassiste Milton Suggs, il ne fait pas partie des cosignataires des titres de l’album mais il apporte tant qu’il faut lui rendre hommage.
Il est situé au centre-gauche dans le spectre sonore, Ari Brown est au centre et Famoudou un peu partout. Son jeu à la basse est le véritable pivot central autour de quoi tout s’articule, il figure comme un totem fixe qui permet aux autres d’afficher leur différence et leurs audaces. L’équilibre ici est parfait.
Un petit mot sur la qualité d’enregistrement qui est très satisfaisante, on entend même quelques bruits d’enfants qui semblent intégrés à la musique, elle est ici, avant tout, de vie...