Plus le temps passe, plus je prends le temps de comprendre les albums que je n’aimais pas à la première écoute. Avec le recul, je réalise souvent que ce rejet venait d’un malentendu : je n’aimais pas parce que je ne comprenais pas. C’est exactement ce qui s’est passé avec uNomkhubulwane.
Cet album de Nduduzo Makhathini est un ovni jazz. Ni free, ni standard — il évolue dans une dimension parallèle, profondément spirituelle, à l’image de son auteur : pianiste magnifique, mais aussi guérisseur imprégné de la culture zouloue sud-africaine.
Chaque morceau est une forme de méditation musicale. Impossible de ne pas penser à l’univers de Thelonious Monk, même si l’univers de Makhathini est tout à fait singulier — mais alors vraiment singulier. La première fois que je l’ai écouté chez moi, je n’y ai rien compris. Puis, quelques mois plus tard, je l’ai redécouvert en concert. Et là, le choc a été cataclysmique. J’ai été totalement happé par les rythmiques labyrinthiques sur lesquelles chaloupe son piano.
On a souvent l’impression que chaque instrument joue sa propre histoire, comme des amis de longue date qui prennent des chemins différents mais finissent toujours par se retrouver, au détour d’un motif ou d’un silence.
Je suis ressorti de ce concert bouleversé. Et aujourd’hui encore, il m’arrive de réécouter cet album, devenu un de mes disques de chevet.
C’est une chose extraordinaire, après tant d’années, de continuer à découvrir des albums qui changent votre vision de la musique et surtout qui se fondent, peu à peu, mais profondément avec votre vie .