Ici, il sera question de boogaloo, chicha psychédélique, descarga, salsa, rumba, cumbia et tout un tas de musique qui résonnent aux fenêtres de New York, Carthagène, Panamá City, la Havane ou Lima. Une musique versatile mais résolument hédoniste, où les thématique romantique, politique ou mélancolique sont souvent prétexte à esquisser un pas de danse chaloupé, à boire, manger ou baiser. À vivre, quoi !
En 2005, je débarque sur planète boogaloo : il est minuit 30 à Barcelone un premier janvier et la fête bat son plein. On est descendu à une petite dizaine fêter la nouvelle année en catalogne et on s’est retrouvé dans un squat ouvert par la CNT dans des anciens studios de télé. Trois salles, trois ambiance : soul/funk à l’étage, rocksteady et ska au basement et musique latine dans la grande salle. Dans cette salle, une meuf est au platine et cale Taking Over de Ralph Robles et c’est comme si Lionel Messi venait de planter une panenka à Casillas : on est tous sur 20 000 volts et c’est l’émeute. J’y connais rien mais je connecte direct. Aujourd’hui c’est toujours un truc qui me fait palpiter et des morceaux comme Pow Wow de Manny Corchado ou Boogaloo Girl d’Alfredito Linares me font perdre les pédales comme cette nuit là.
Outre une production signature du genre où le placement de micros au milieu d’un orchestre énorme à une importance capitale et amène un tas de nuances, j’aime particulièrement le boogaloo new yorkais pour la construction fascinante des chansons : il y a cet espèce de contrepoint permanent très malin où les différentes parties chantées sont seulement soutenue par une basse, un piano et une section rythmique dépouillée (pas de batterie) marqué par la cowbell pour laisser place à l’incadescence des refrains où les cuivres bastonnent entre harmonies et dissonances qui font exploser le titre. Et le titre Taking Over de Ralph Robles cité plus haut en est un exemple parfait.
Pourquoi pas faire un trait d’union entre la Colombie et New York avec ce single de Willie Colon Eso se baila asi. Initialement sorti chez Fania en 1968 sur le long-play The Hustler, ce titre qui raconte l’histoire d’une meuf qui apprends à Willie à danser le boogaloo a eu droit à son pressage Fuentes colombien. Une des figures du label new yorkais Fania, Colon fera les grandes heures de cette maison de disque historique (il enregistre son premier LP à 17 ans) avec ou sans Hector Lavoe son sidekick. New York City dans ces années là est encore un vrai gangland fait de terrains vagues, slums et immeubles délabrés, et si Joe Bataan joue le chat des rues un peu voyou, le personnage de Colon, lui, est le gangster raffiné, suave (Suabé!), fasciné par la mafia italienne et ses codes : à l’instar de son look, quasi toutes ses pochettes sont un hommage aux Five-Points gang. Et comme l'a dit un acteur français de renom, ça mitraille sec.
Pour les nouveaux, si vous cliquez sur l'image du disque vous arriver sur le titre ad hoc sur youtube.
