
Brötzmann, Friis Nielsen, Uuskyla – Medicina – (2003)
Cette bonne « médecine » est issue d’un travail en studio au « Bohus », le seize mars deux mille trois. Ils sont donc trois coresponsables, le trépidant Peter Brötzmann joue des saxs ténor et alto, de la clarinette alto et du tarogato, Peter Friis Nielsen tient la basse électrique et Peeter Uuskyla joue de la batterie.
L’album est plein à mort, normal donc qu’il se range côté tuerie. Mais il est lourd, massif et même assez lent, comme difficile à déplacer. Pourtant Uuskyla frappe dur et fort, il déménage avec une grande puissance et balance sévère. Le troisième Peter, à la contrebasse, fait le liant entre les deux autres qui s’acharnent à nous faire ingurgiter ces bons remèdes !
Forcément c’est Brötzm le héros, celui qui se tient droit dans la tempête et envoie la masse sonore. D’abord à l’alto sur « Rocket Tango » puis enchaîne avec « One, Two, Three, Free ». Ensuite il embouche le sax ténor et envoie « Artemesia » puis « Justicia », il campe, planté au sol et souffle avec cette puissance hors du commun, généreux et énergique, des phrases courtes qui se succèdent en rafales, et vous envoie son traitement revigorant, l'universelle panacée autrefois promise par un autre…
A ce stade on est bien pris, prisonnier d’une furie qui s’étale déjà sur plus de trente six minutes sans la moindre pause, captés et passifs, c’est là que ça bascule avec « Some Ghosts Step Out », une histoire d’ascenseurs ridiculement étroits qui montent et redescendent, habités par d’étranges fantômes, à l’hôtel « Adlon » de Stockholm... La rythmique reprend des couleurs vers l’avant, la basse de Friis Nielsen lâche des bordées informes et Brötzm qui lève un peu les pouces sur cette pièce qui frise le quart d’heure.
Place à la clarinette alto pour « Here And Now », une pièce lente et quasi contemplative où chacun joue sa partie à l’avant, les trois s’écoutent et se parlent, chacun dans son créneau, la pièce est très réussie. « Bones And Beans » qui suit, voit arriver le fameux tarogato avec ce son terreux et animal, Brötzm le maîtrise parfaitement et en tire des sons inhabituels et parfois inouïs.
La dernière pièce est grandiose et conclue merveilleusement cette excellente cuvée. « Hard Time Blues » qui dépasse les treize minutes est exceptionnel, une montée lente et progressive comme on les aime, avec un final somptueux.
Rocket Tango