
Ame Son, composé du guitariste Bernard Lavialle, du bassiste Patrice Fontaine, du batteur chanteur Marc Blanc et du flûtiste François Garrel a été un groupe de Rock Progressif Français qui fut surtout actif entre 1967 et 1973.
Fondé au cours de la période charnière entre le Rock Psychédélique et le Rock Progressif, Ame Son mèna des expérimentations mêlant des éléments venus du Psychédélisme et de l'Avant-Jazz. Il créa ainsi un Rock nouveau et singulier, fortement influencé par le groupe Gong des débuts, en grande partie basé sur l'improvisation (flûte et guitare), qui servirait de repère à nombre d'autres formations intéressées par l'exploration des frontières entre Rock et Free Jazz.
Ame Son est donc un bon exemple de ce que pouvait être la scène progressive Française à l'époque. Il fut l'un des rares groupes Français de la fin des années 60 à pouvoir rivaliser avec la scène progressive Anglaise alors en pleine explosion. Proche de Daevid Allen (Soft Machine, Gong), les musiciens d’Ame Son ont proposé durant la brève existence du groupe, entre 1969 et 1971, des compositions semi-improvisées dans lesquelles les textes du batteur Marc Blanc étaient associés aux guitares de Bernard Lavialle et Patrick Fontaine, soutenues par la flûte de François Garrel.

A noter qu'Ame Son fut d'abord, à l'origine, un groupe qui jouait dans les rallyes des beaux quartiers, les 'Primativ's', puis ils devinrent 'Expression' en 1967, au moment de l'explosion psychédélique.
Mais tout avait commencé au lycée où Marc Blanc avait monté un groupe avec des copains qui s’appelait les Primitiv’s. Ils jouaient vraiment de façon semi-professionnelle dans les petits clubs de Paris en se bâtissant une petite carrière. Ils avairnt aussi fait une saison en Corse.
Après ça, las de faire tout le temps les mêmes morceaux, ils étaient allé à Londres.
Là, ils avaient découvert Soft Machine et toute l’avant-garde Anglaise.
Ils avaient alors commencé à travailler avec des musiciens de Free Jazz comme le batteur de Jazz virtuose, Jacques Thollot qui avait accompagné dès l’âge de treize ans les plus importants jazzmen tels que Chet Baker, Eric Dolphy, Don Cherry, Barney Wilen…
Pendant deux, trois mois, ils aient essayé de faire de la musique expérimentale dans un groupe qui s’appelait Expression. C’est au coeur de ce groupe qu’ils avaient rencontré le réalisateur Jérôme Laperrousaz.

Leur guitariste avait alors été appelé à l’armée et Jérôme leur avait dit : "Il y a Daevid Allen qui est à Paris et vous pourriez peut-être jouer avec lui".
Car, en 1967, Daevid Allen avait quitté Soft Machine du fait qu'il ne pouvait plus rentrer en Angleterre pour des questions de visa et Il avait décidé alors de s’installer en France.
Il faut dire qu'à la fin de 1967, en France, il y avait bien un noyau Underground, mais tout petit et Daevid Allen jouait à la cave de La Vieille Grille où il y avait Brigitte Fontaine en vedette. Jacques Thollot y jouait avec Barney Wilen. Il y avait aussi l’acteur Jean-Pierre Kalfon. Tous ces gens gravitaient autour du Rock’n Roll et de l’Art contemporain…
C’était un tout petit groupuscule Underground. Il n’y avait pas vraiment de lieu et les gens se connaissaient comme ça et C’est là que c'était intéressant.
A un moment, il y a eu une grosse scène Psychédélique, c’était La Fenêtre Rose en Septembre 1967 où jouaient Soft Machine et toute la scène Underground Anglaise.
Mais Paris était quand même petit à l’époque, même le Rock’n Roll était petit.
Quand Jimi Hendrix ou les Stones venaient, c’était pour une journée et pour faire l’Olympia. Donc, déjà le Rock était petit, alors le Rock Underground!
Bref, Daevid Allen avait fini par rencontrer Marc Blanc (chanteur et batteur) et Patrick Fontaine (bassiste). Cela s’était tellement bien passé qu'ils avaient joué avec lui et formé le groupe Bananamoon.

Ils avaient fait des maquettes avec Jérôme Laperrousaz en studio. Celles-ci se retrouvent d’ailleurs sur le disque "Banana Moon" qui sortira en 1971.
Le groupe avait aussi rencontré Philippe Garrel qui était ami avec Jérôme Laperrousaz et qui était un peu considéré comme le nouveau Jean-Luc Godard.
En 1968, Ame Son joua souvent avec Daevid: en Espagne durant l’Eté, à Avignon… et dans le Sud de la France au début 1969. Ensemble, ils avaient fait des débuts de vie communautaire en 1969 dans la Drôme et ils répétaient le premier album de Gong.
A cette époque, il y avait relativement peu de groupes et ils trouvaient facilement du travail dans les boîtes de la côte mediterranéenne pour lesquelles c'était du plus grand 'In'.
C'est aussi comme ça que Soft Machine s'était retrouvé à jouer pour une pièce de Picasso, "Le Diable tiré par la Queue" à St Tropez en 1968. C'était aussi l'époque où Ibiza était une destination très courue dans le milieu underground (voir "More", le film de Barbet Schroeter, avec la musique du Pink Floyd), avant l'arrivée des charters et du béton. Des gens comme Nico fréquentaient l'île dès les années 50 (c'est d'ailleurs là qu'elle est morte en 1988).
C’est à ce moment-là que Bernard Lavialle, le guitariste était rentré. Marc Blanc commençait à avoir des choses qu’il avait écrites, des poèmes et il avait envie de monter son propre groupe.
Après 68, la France avait changé. C’est Jean Karakos qui avait fait exploser les choses. Là, toute une scène s’était révélée.
Le concert de Soft Machine du 25 Juin 1969 au Bataclan avait été un choc pour le groupe car ils avaient eu des invitations pour ce concert. En vedette, c’était Soft Machine et, en première partie, plein de groupes Français.
Ils y rencontrent Adrien Nataf qui travaillait chez le disquaire PAN et qui deviendra quelques temps plus tard leur manager.
Blanc connaissait quasiment un membre dans chaque groupe et il s'était dit qu’ils avaient raté le coche car ils jouaient avec un des fondateurs de Soft Machine et ils n’étaient pas sur scène!
Il s'était dit aussi dit qu’il fallait qu’il fasse son propre groupe, car il allait passer à côté de cette vague. Revenu dans la Drôme, il avait dit aux autres: "On va reprendre notre truc parce qu’il faut y aller!".
En Juin 1969, Marc Blanc et Patrick Fontaine forment donc un groupe qu'ils baptisent Ame Son avec François Garrel (flûtiste) et Bernard Lavialle (guitariste).
Ils ont alors commencé à se monter un répertoire pour ensuite jouer un peu à Saint-Tropez et dans des petites boites pendant l’été.
En rentrant à Paris en Septembre 69, Jérôme Laperrousaz a dit à Marc: "Téléphone à Karakos à BYG Records, il va vous signer. Il n’y a pas de problème!".
Le label de Karakos occupait un étage en commun avec Sarahva, la maison de disques de Pierre Barouh chez qui il y avait Jacques Higelin, Brigitte Fontaine. C’était vraiment bouillonnant chez BYG.
Dix minutes d'entretien et Karakos les signe. Il leur a dit : "Moi, je veux faire sauter le système français. Je veux sortir vingt-cinq disques en même temps. Vous en ferez partie".
C’est Pierre Lattès qui devient leur directeur artistique. Il avait écouté un peu leur musique et leur avait dit : "Il n’y a pas de soucis: vous partez dans quinze jours à Londres!".
A Londres, en deux jours de studio, ils ont fait tous les backs musiques de leur album, "Catalyse". C’était un bon studio avec un huit pistes et Pierre Lattès était là pour superviser.
Avec beaucoup de liberté, ils avaient préparé des pièces de six à huit minutes au sein desquelles il y avait des improvisations ou des intros un peu Free Jazz et des poèmes. Ces pièces étaient presque prêtes et ils avaient tout enregistré d’un coup. Souvent, ils improvisaient en ayant préparé un thème et en sachant qu’ils allaient arriver à celui-ci.
Ils se faisaient des signaux entre eux pour se dire : "Là, on part sur une chose puis on revient". Il n’y a pas eu de montage, pas de trucages, sauf qu'ils n’avaient pas fait les voix à ce moment-là. Ils les ont faites en France après, ce qui a posé un problème. Ce n’était pas les mêmes studios, c’était plus technique. Cela s’entend un peu à l’écoute du disque.
Paradoxalement, le groupe a refusé que le disque sorte parce qu’ils n’en étaient pas tout à fait contents. Tant que la première mouture d’Ame Son a existé, il n’est pas sorti. Il est seulement sorti fin 71 et il n’a jamais été réellement chroniqué. Il s’est répandu au fil des années.
Par contre, ils avaient eu de très bonnes critiques pour tous leurs passages sur scène. C'est un des seuls groupes Français à avoir fait le grand chelem des festivals: Amougies, les Halles, le Bourget, Biot…
A Amougies, c’était la première fois qu’ils jouaient devant un grand public. et ils ont été très applaudis à la fin du premier morceau, ce qui les a soulagé. Ils ont eu aussi un contact avec Frank Zappa très intéressant.
Après, ils ont eu de bonnes critiques de Paul Alessandrini dans Rock’n Folk.
Le festival d’Amougies en Octobre 1969 devait se tenir à Paris et il avait été interdit. Il avait eu lieu en Belgique parce que c’était post-68. Le gouvernement avait peur des rassemblements de jeunes, des cheveux longs, de la drogue, etc.
Le deuxième festival, Les Halles où ils manifestaient contre la destruction des pavillons des Halles.
L’Eté d’après, Biot est autorisé. Ame Son devait jouer en soirée. Il y avait Pink Floyd, Eric Clapton… ça se passe plutôt mal et le festival est interdit par la police parce que des gauchistes envahissent les lieux.
On entend alors: "Les festivals, c’est dangereux, on va interdire tout ça". On était quand même dans une période de répression. Les gens ont du mal à imaginer que le Rock était à ce point interdit à l’époque.
C’était très dur à vivre après une belle année où ils avaient fait les festivals. Ils avaient un peu d’argent, quelques bons articles. Ils jouaient dans les maisons des jeunes, puis c’est devenu difficile. Par contre, avec une bonne dose de courage, Daevid Allen a continué avec Gong.

"Catalyse", qui est paru chez BYG Records après la séparation du groupe, témoigne de la créativité d’Ame Son entre Rock Progressif, Psychédélisme et Free Jazz.
Le groupe et son unique album ne sont pas très éloignés de la musique expérimentale. Dommage cependant que le groupe n’est pas eu les moyens d’explorer sa créativit: deux ans seulement.
Le grand drame de beaucoup de groupes des années 70 en France. Epoque qui ne jurait que par la musique Anglo Saxone… Et la musique gratuite.
La première mouture d'Ame Son a donc arrêté en Juin 71, bêtement. D’abord, il n’y avait plus de festivals et ils avaient du mal à gagner encore de l'argent. Ils n’avaient pas un bon manager non plus.
Après, ils ont remonté plusieurs fois le groupe mais jamais avec cette dynamique car la vague était passée.
Par exemple, en 1973, une reformation voit le jour avec la participation de quelques invités comme Jacques Dubon (Guitare, Chant), Alain Renaud, ancien guitariste de Triangle sans oublier Jean-Louis Aubert (futur Téléphone) le temps de quatre concerts.
Marc Blanc avait rejoint Red Noise en 1971 le temps d’une dizaine de concerts orientés Free. Ensuite il avait auditionné pour Komintern . "Ils m’ont jeté, reconnait-il. Je n’avais pas l’esprit maison", et il joua pour Vince Taylor.
Puis c’est l’aventure Eclosion, un trio Orientalo-Psychédélique, dont l’unique album sortira 42 ans plus tard chez Monster Melodies.
Sous son nom, il publie ensuite plusieurs singles et trois albums dans les années 80: "Prédestinée" en 1981, "Paris Plage" en 1983 et "Electric Troubadour" en 1985.
Ensuite, il lui arrive parfois de se produire sur scène sous le nom d’Ame Songs. On peut encore le croiser pour quelques concerts en compagnie de François Garrel à la flûte, même si son activité principale reste prof de tennis du côté du jardin du Luxembourg à Paris.
Patrice Fontaine participe à l’aventure Cheval Fou en 1973 puis à celle de Nyl.
On le croise également auprès de Mahjun, Robert Wood et Graeme Allwright.
Dans les années 2010, il est chef de projets d’un office public de l’habitat et tient la basse dans un big band Jazz d’un conservatoire de la région parisienne.
A signaler que les musiciens d'Ame Son jouent encore ensemble de temps en temps.
Nouvelle réunion en 1995 pour quelques concerts, avec François Pauvros à la guitare afin de mieux promouvoir la réédition en CD de "Catalyse" qui contient en bonus les titres de l’unique single sorti quelque temps après l’album en 1970.

L'album "Primitive Expression" paru en 1998, contient des enregistrements de 1971 et d'autres de 1975.
Avec les années, il y avait des morceaux enregistrés qui n’étaient pas sortis. Il y a un morceau, "Le Grand Cirque De La Lune", qu’ils avaient fait pour le film "La Cicatrice intérieure" (1970) de Philippe Garrel. Il sonnait vraiment comme du Ame Son. Il yavait aussi un morceau live qu’ils jouaient en 71-72 et différentes expériences comme ça. Ils les ont compilées. Il y avait aussi des morceaux qu’ils jouaient du temps des Primitiv’s et qu’ils avaien réenregistrés en 74. Les Espagnols avaient d’ailleurs sorti un 45 tours qui ne contient que les morceaux garage rocks des Primitiv’s.
Autre concert qui fit date: celui donné au mariage de François Garrel en 2006. Preuve qu’ils ne sont pas fâchés!
Marc Blanc reprenant du service au gré des demandes après une reformation en 2008.
C’est ainsi que l’année 2009 les vit sur la scène du Point Ephémère à Paris, mais aussi à Bruxelles pour le festival Krak et en Octobre à l’espace Ricard.
L’aventure continue! Même si comme l’a dit Didier Malherbe un soir d’annulation de concert pour raison de grèves contre le plan Alain Juppé : "Les gars, je crois que vous avez un mauvais karma".

Un nouveau 45 tours vinyle autoproduit, "Black Trees / Your Skin" est sorti le 2 Juin 2017. Enregistré entre 2014 et 2017 par le groupe formé de Marc Blanc, Bernard Lavialle, François Garrel et Romeo Blanc à la guitare et au chant.
A noter de façon anecdotique que Ame Son figure sur la 'Nurse with Wound' list.
Discographie:
1971 : Catalyse
1998 : Primitive Expression
Sources: wikipedia, rockmadeinfrance.com, Alain Hertay, Marc Blanc